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— Pourquoi, diable, gâtez-vous le plaisir de mes hommes ? Ne voyez-vous pas qu’ils sont prêts à donner ? ...

— Ma foi ! en v’là un qui a du toupet ! dit Crook. Laissez là vos rochers, mes garçons, et venez prendre le thé avec eux.

— Y a joliment peu de sucre dedans, dit un camarade derrière moi.

Crook l’entend, il se met à rire : — Mais vous avez tous des cuillères !

Et nous dégringolons la montagne aussi vite que nous le pouvons. Arrivés en bas, nous nous cognons aux Tyrone, et tout le monde pousse d’un tel élan qu’on se trouve pris dans la foule des Paythans à ne pouvoir remuer ni bras ni jambes. »

Otheris place ici son mot. Tout en se frottant le ventre d’un air méditatif :

— Ouf ! on était serré dans ce trou là... J’ai cru éclater...

— C’est vrai que ce n’était pas un endroit pour les petits hommes, dit Mulvaney en posant sa main sur l’épaule d’Ortheris. Un petit homme pourtant m’a sauvé la vie. Nous étions collés là d’une drôle de manière, car du diable si les Paythans reculaient et du diable si nous n’avancions pas, notre affaire étant de débarrasser le boyau de cette vermine. Le plus drôle, c’est que nous nous soyons jetés comme ça, nous et eux, dans les bras les uns des autres. On fut longtemps sans tirer, rien que l’couteau et la baïonnette, quand nous pouvions dégager nos mains, et ce n’était pas souvent. Et les Tyrone aboyaient derrière nous d’une façon que je ne comprenais pas, mais que plus tard j’ai comprise, et les Paythans, ils l’ont comprise aussi !

— Genou contre genou ! que chante Crook avec son mâtin de rire. — Il embrassait un grand Paythan velu, ni l’un ni l’autre ne pouvant faire que ça, malgré leur envie de faire mieux.

— Poitrine contre poitrine ! qu’i dit, comme le Tyrone nous poussait de plus en plus.

— La main par-dessus le dos ! crie un sergent qui se trouvait derrière.

Et je vois un sabre passer derrière l’oreille de Crook, comme le dard d’un serpent, et mon sauvage est pris par sa pomme d’Adam, ni plus ni moins qu’un cochon à la foire.

— Merci ! dit Crook, aussi froid qu’un concombre sans sel. J’avais besoin d’un peu de place. — Et il avança de l’épaisseur d’un corps d’homme, ayant maintenant l’individu sous lui. Le