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sérieux avec son amant de cœur, trompe par caprice celui-ci avec un passant, après quoi, s’étant très vite ennuyée de cette distraction passagère, elle revient à son amant de cœur, sans avoir jamais cessé de recevoir de son protecteur sérieux les avantages solides qu’il lui doit ; prenez ce sujet comme vous voudrez, retournez-le de telle manière qu’il se pourra : vous n’en tirerez jamais qu’une comédie déplaisante, mais surtout ennuyeuse. C’est le cas du Béguin. Vainement M. Pierre Wolff y a-t-il dépensé de réelles qualités, habileté de composition, art de filer joliment une scène, trouvailles de mots ou de jeux de scène. Vainement les excellens acteurs du Vaudeville y ont-ils mis toutes les ressources d’un talent éprouvé : Mlle Réjane sa fantaisie, sa nervosité, ses mines et son agitation, M. Lérand cette autorité qui lui permet de faire un sort aux rôles les plus insignifians, M. Nu mes sa bouffonnerie savoureuse, M. Gauthier sa bonne grâce, M. Grand sa bonne volonté. Le Béguin n’en est pas moins un spectacle fort désobligeant.

Entre un vaudeville bien venu et un vaudeville manqué, il n’y a vraiment qu’une différence : c’est que l’un est bien venu et que l’autre est manqué. A coup sûr, c’est une différence essentielle, mais on perdrait son temps à vouloir en chercher les causes et l’expliquer par raisons démonstratives. L’inspiration souffle où elle veut. Les Maris de Léontine sont un des vaudevilles les plus amusans que nous eussions vus depuis longtemps. Il y a d’un bout à l’autre de la gaieté, de l’entrain, un jaillissement de belle humeur, une plaisanterie facile et de bon aloi. La pièce est jouée avec beaucoup de verve par MM. Germain, Torin, Colombey et par Mlle Cassive.

Le Complot est un vaudeville manqué. La donnée première en semble assez ingénieuse. Un mari infidèle veut se procurer un motif d’absence hors du domicile conjugal. Il obtient par faveur de se faire arrêter : le magistrat complaisant a promis de le relâcher aussitôt. Mais l’épouse, prévenue à temps, obtient du magistrat de plus en plus complaisant qu’il retienne sous les verrous le mari volage. Ce point de départ en valait certainement un autre ; mais l’inspiration est restée en route.

M. Galipaux et Mlle Yahne ont fait de leur mieux, sans parvenir à nous dérider.


DOUMIC.