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LA PETITE DEBNlèRE ; 27

— Oh ! le mariage Ta beaucoup vieilli... Vous n’avez jamais été marié, commandant ?

— Non... je n’ai pas encore songé au mariage... Et vous ? reprit-il en souriant indulgemment.

— Pas encore, non plus... C’est-à-dire, personne n’a songé à me demander... N’ayant pas de dot, voyez-vous, je suis d’un placement difficile.

— Mais... vous vous marieriez volontiers, le cas échéant ?

— Oui... Avec un homme qui m’aimerait... et qui ne serait pas le premier venu...

— Ah ! ah ! interrompit le commandant, vous aussi, vous rêvez d’épouser « le fils du roi... »

— Erreur !... Je suis moins chimérique que ça. Je voudrais simplement un mari qui me plût et qui me promît d’être bon pour mon pauvre papa... Nécessairement il faudrait qu’il eût une position et un peu d’argent, puisque je n’ai pas le sou ! Le visage de Le Dantec s’était éclairci. Il poursuivit d’un ton enjoué et affectueux :

— Je vois que vous n’êtes pas égoïste et que vous songez plus aux autres qu’à vous... Le contentement de M. Pontal semble vous tenir au cœur ?

— Dame oui !... Entre nous, — mais n’allez pas le redire, — il a de lourdes charges sur les épaules... Maman est absorbée par son grand ouvrage ; mes sœurs ne s’occupent que de leurs plaisirs, et c’est lui qui a toutes les responsabilités, toutes les charges de la maison. A son âge, il est encore obligé de donner des répétitions pour que nous puissions joindre les deux bouts. Je serais si heureuse de le soulager d’une partie de ses tracas !

— Et vous pensez que votre mari vous aiderait à lui rendre la vie plus facile ?

— Naturellement... s’il m’aimait... Et moi, je l’en aimerais doublement... Nous prendrions souvent papa avec nous, nous le gâterions et nous mènerions une existence très heureuse à nous trois...

— Vous êtes une brave enfant ! murmura Le Dantec, en posant paternellement sa main sur le bras de Paulette, vous méritez que l’avenir se charge de réaliser votre rêve... Elle se rappela qu’un soir Rivoalen lui avait dit ces mêmes mots : « Vous êtes une brave enfant ! » et, tout d’un élan, sa pensée se reporta vers les incidens de la journée ; elle se répéta inté-