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l’électricité, il s’occupa des méthodes de sondage et construisit un instrument, maintenant en usage dans toutes les marines du monde, où il rend de précieux services, car s’il ne répond pas à tous les besoins, il est indispensable dans certaines circonstances fréquentes en navigation.

L’invention de sir William Thomson est double. Tout d’abord il remplaça la ligne en chanvre ou en soie par un fil d’acier ou corde à piano. Il augmentait ainsi prodigieusement la force portante, diminuait la surface et la rendait extrêmement lisse, de sorte que le frottement diminuait dans une énorme proportion.

L’invention n’est pas sans inconvéniens. Les Américains en avaient eu antérieurement l’idée et l’avaient abandonnée après l’avoir expérimentée à bord du Taney. Le fil d’acier est sujet à se rouiller malgré toutes les précautions prises pour le protéger en le conservant dans un bain d’huile ou d’eau de chaux. Il forme facilement des coques. Or à l’endroit d’une coque, même redressée de manière à devenir invisible, la force portante est diminuée des trois quarts. Comme les appareils à retirer des échantillons de fonds, indépendamment du poids de fonte destiné à être abandonné, sont d’un prix élevé, qu’on a souvent besoin, tout en exécutant le sondage, de récolter des échantillons d’eau profonde et de suspendre plusieurs thermomètres pour prendre la température à diverses hauteurs, on n’attache pas sans émotion des instrumens coûteux à un mince fil d’acier susceptible de se briser comme du verre pendant l’opération, par suite d’une imperceptible attaque de rouille ou d’une coque redressée, et encore moins facile à distinguer. C’est pourquoi un éminent océanographe auquel une longue pratique a donné une compétence particulière dans ces questions, le professeur J. Y. Buchanan, prétend que se servir d’un fil d’acier, malgré tous les avantages qu’il comporte, lorsqu’il n’est pas absolument indispensable, équivaut à un véritable acte de barbarie à l’égard des instrumens. On en revient donc aujourd’hui, au moins dans certains cas, à la ligne de chanvre, avec poids suspendu de Brooke et accumulateurs suffisamment délicats.

L’autre invention de sir William Thomson consistait à faire inscrire la profondeur atteinte, d’abord par une roue métrique sur laquelle roule le fil en descendant et dont le nombre de tours est enregistré par un compteur, et en même temps par un petit appareil attaché au plomb de sonde et destiné à aller jusqu’au