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étendues : elles sont alors comprises généralement entre 0° et 3° au-dessous de zéro. Des variations assez considérables de concentration ne peuvent, par suite, se traduire que par des différences cryoscopiques assez faibles. Il faut donc compenser par la sûreté et la sensibilité des mesures, la faiblesse des écarts et, par suite, la possibilité des erreurs. C’est à un défaut de sensibilité des mesures que les contradicteurs des théories nouvelles attribuent l’apparente proportionnalité entre les abaissemens de congélation et les concentrations, c’est-à-dire la loi de Blagden.

Les expérimentateurs se sont appliqués, surtout en ces dernières années, à perfectionner les appareils cryoscopiques et à approfondir les plus petites circonstances qui peuvent influer sur le phénomène. Un physicien soigneux et perspicace, M. Ponsot, s’est distingué, à côté de M. Raoult et quelquefois contre lui, dans la discussion des conditions expérimentales et dans la réalisation des perfectionnemens de la méthode et des appareils.


III

Dans le rapport que M. Debray lisait à l’Académie) des sciences le 15 octobre 1883, l’éminent chimiste, après avoir rendu compte des travaux de Blagden, de Rudorf et de M. de Coppet, s’exprimait ainsi : « On voit que le phénomène du retard à la congélation a déjà donné lieu à des recherches importantes, mais trop particulières, cependant, pour conduire à une loi générale. L’eau a été jusqu’ici le seul dissolvant étudié, et aucune expérience suivie n’a été tentée sur le groupe considérable des matières organiques ; les matières salines seules ont été examinées au point de vue qui nous occupe. Le savant professeur de chimie de la Faculté de Grenoble, M. Raoult, a entrepris de combler, dans la mesure du possible, une lacune aussi considérable. »

C’est, en effet, seulement de l’eau, comme dissolvant, et des sels, comme corps dissous, que s’étaient préoccupés les prédécesseurs de M. Raoult ; Blagden, Despretz, Dufour, Rüdorf et de Coppet. Il y avait là une lacune ; il y avait, aussi, mauvais choix. L’eau est, en effet, contre-indiquée parce qu’elle contracte très facilement des combinaisons avec les sels. Il se forme, surtout quand la solution se concentre, des produits intermédiaires, des hydrates qui se comportent comme de nouveaux corps, différens du corps originel et rendant très difficile l’évaluation quantitative, soit pondérale, soit moléculaire du corps dissous. D’autre part, dans le cas de solutions aqueuses étendues, les