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d’agir, grâce à la supériorité individuelle de ses navires, créés et construits par des intelligences et des mains françaises, avec le bon sens et l’esprit méthodique de nos ingénieurs et de nos artilleurs français.

Tout le monde a cru ou plutôt tout le monde croit ceux qui disent le contraire, qui célèbrent le contraire, encadrant et faisant valoir, avec leur éloquence déclamatoire, dans les débats annuels du budget, les qualités fictives ou exagérées de nos adversaires. Nous voyons, en effet, surtout depuis une douzaine d’années, des hommes d’Etat, très ignorans du fond des choses, se faire les complices de la vantardise systématique, savante et très adroite, des publicistes et des hommes d’Etat anglais. Nous l’avons déjà dit, mais on ne saurait trop y revenir, les hommes d’État, ou soi-disant tels, qui dirigent depuis longtemps les affaires de la France, ne peuvent régner comme ils l’entendent, en toute sécurité, qu’en diminuant et vouant à l’impuissance les têtes de nos armées maritime et terrestre. Cette réflexion ne s’applique pas à telle ou telle personne ; elle n’est pas applicable exclusivement aux dix, douze ou quinze dernières années de notre histoire ; elle est vraie depuis longtemps, depuis que le régime parlementaire, qui n’est que l’irresponsabilité méthodiquement organisée, est défini par des Constitutions où le mot de responsabilité s’étale à chaque ligne. Cette vérité saute aux yeux. Sous la monarchie de Louis-Philippe, on en voit des preuves répétées dans les affaires militaires de l’Algérie. D’une façon inconsciente, nos parlementaires ont presque toujours obéi à des mots d’ordre venus de l’étranger ; l’aristocratie à l’envers, qui est devenue maîtresse de notre pays, travaille à l’anéantissement de tout ce qui peut faire de la France une nation capable d’offensive, et par suite respectable dans un monde où le droit de la force est plus que jamais souverain.

Il n’en est pas moins certain que nos navires sont satisfaisans tels qu’ils sont, et bien qu’ils eussent pu, si leurs créateurs avaient été plus libres, avoir plus complètement les qualités françaises, être mieux adaptés à l’emploi de notre personnel et au but à atteindre, nos navires, dis-je, sont de beaucoup supérieurs à ceux de nos adversaires qui, eux, sont parfaitement anglais et présentent les qualités et les défauts du peuple qui les a créés ; à savoir, qualités : extérieur très soigné, apparence majestueuse, grande taille, air confortable et riche ; — défauts : manque de sens militaire remplacé par le sens mercantile, d’où incohérence,