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perfectionnemens qui ont amené un nouveau triage. Il ne reste debout aujourd’hui que trois ou quatre formules, et même, parmi elles, des expériences récentes nous permettent peut-être de nous prononcer. D’un autre côté, on a vu, en plus d’un pays, non seulement la majeure partie des classes éclairées, — mais encore les masses, quand on s’est donné la peine d’aller à elles, — accueillir, avec un empressement qui, dans certains cas, atteignait l’enthousiasme, d’abord l’idée de la représentation proportionnelle, ensuite le système destiné à la réaliser. Partout où elle a été introduite, les opérations se sont poursuivies, dès la première épreuve, avec une intelligence, une correction et une rapidité qui n’ont rien laissé à regretter du régime majoritaire. Le dépouillement a pris parfois un peu plus de temps que sous le régime antérieur ; mais les scrutateurs s’en sont tirés avec une facilité qui les eût étonnés eux-mêmes, si les opérations de hautes mathématiques dont on les menaçait ne s’étaient réduites à quelques applications des quatre règles ; encore la besogne peut-elle être allégée par des tables de calcul préparées d’avance. Pourquoi ce qui s’est passé chez ces peuples ne se reproduirait-il pas parmi tous ceux qui pratiquent le régime représentatif ?

C’est en France, à la fin du XVIIIe siècle, qu’apparaît pour la première fois l’idée de la représentation proportionnelle, avec Condorcet et Saint-Just. Ce dernier proposa à la Convention de faire nommer les membres du Corps législatif dans un seul scrutin ; chaque électeur n’aurait pu voter que pour un nom, les sièges auraient été dévolus aux candidats qui auraient obtenu le plus de suffrages. Ce système a quelque chose de séduisant par sa simplicité ; mais il tend à établir une égalité fictive entre des groupes numériques fortement différenciés, sans compter la difficulté d’introduire l’unité de collège.

Ces inconvéniens furent corrigés par le comte de Villèle, l’ancien ministre de la Restauration, lorsqu’il émit, en 1839, l’idée de laisser aux électeurs de chaque département la faculté de se grouper en collèges facultatifs, ceux-ci se partageant les sièges du département d’après le chiffre de leurs adhérens respectifs. Il est assez intéressant de constater que ce système fut appliqué, l’année suivante, dans la ville australienne d’Adélaïde, pour l’élection de la municipalité : les électeurs se groupaient librement dans des collèges qui n’avaient plus d’autre formalité à remplir, quand ils réunissaient un certain nombre de suffrages, que