Page:Revue des Deux Mondes - 1900 - tome 157.djvu/520

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

non pas au mot, mais à l’idée de suzeraineté, pour en déduire une espèce de dépendance générale. C’est ainsi qu’il s’écria : « Le fait capital pour moi, c’est la suprématie, la prédominance, la prépondérance…, appelez-la comme vous voudrez[1]… » Cette idée de « paramount power » le hante ; il veut à toute force l’introduire sous l’étiquette de la « suzeraineté » de 1881 ; et, dès lors, il a prétendu obliger le Transvaal à reconnaître cette suzeraineté dans un sens général. A peine le Transvaal eut-il fait mine de regimber que les régimens d’Aldershot ont reçu l’ordre de s’embarquer.

À ces prétentions ridicules les Boers ont riposté par le plaidoyer serré et foudroyant du docteur Leyds ; en Europe, en Amérique, en Afrique même, tous ceux qui font autorité dans le droit international se sont levés en nombre pour donner le coup de grâce à M. Chamberlain et à ses rodomontades. Je citerai M. Arthur Desjardins, de l’Institut de France ; M. Westlake, de l’Université de Cambridge ; M. Van der Vlugt, de l’Université de Leyde ; M. Despagnet, de l’Université de Bordeaux ; M. de Louter, de l’Université d’Utrecht ; M. le docteur Whiteley, dans le Forum américain ; M. le docteur Farelley, du Cap, etc. Pour soutenir la thèse du secrétaire pour les Colonies, pas un spécialiste ne s’est présenté. Au contraire, on s’est fort gaussé de sa théorie « du double préambule, » comme si lord Derby lui-même n’avait pas mis le premier entre crochets, lorsqu’il fit remettre son projet à M. Krüger. On a fait valoir, à ce propos, que le gouvernement du Cap, par sa dépêche du 27 février 1884, annonça lui-même au président Steyn la conclusion de la nouvelle convention, en ajoutant que la position du Transvaal serait dorénavant toute pareille à celle de l’Etat libre, à la seule exception du veto restreint[2]. On a produit la déclaration officielle de lord Derby du 15 février 1884 : « Votre gouvernement sera laissé libre de gouverner le pays sans intervention, de conduire ses affaires diplomatiques et d’établir sa politique extérieure, en respectant seulement les stipulations de l’article 4. » On a insisté sur la formule par laquelle la députation, le 28 juillet 1884, communiqua la convention au Volksraad, formule portée à la connaissance de l’Angleterre et acceptée sans protestation de sa part[3]. On a avancé que,

  1. Acts of Parliament, p. 277 a : « The cardinal fact for me is supremacy, predominance, preponderance, paramountcy, call it what you will. »
  2. Livre Jaune de l’État d’Orange, p. 9.
  3. Livre Bleu, c. 950. 7. n° 4 et p. 8.