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Mais tout citoyen y est électeur ; les membres du parlement ne siègent que quatre années ; toute personne qui occupe des emplois publics rétribués est exclue de l’éligibilité au Volksraad ; tout électeur peut officiellement porter plainte même contre le Président[1]. Partout il y a des jurys. Tout fonctionnaire, juge ou officier local est élu par ses concitoyens, et tous les citoyens de la république, d’autre part, nomment le président et même le commandant général. En vérité, il faudrait que les Anglais prissent avec la logique d’étranges libertés pour faire s’accorder avec tout cela une définition acceptable de « l’oligarchie. »

Ce n’est pas tout. Les Léonard’s et consorts nous disent bien qu’à Johannesburg, les impôts dépassent proportionnellement la somme payée dans tout autre État ; mais ils oublient d’ajouter qu’un ouvrier blanc gagne, dans cette même ville, 25 francs par jour, ce qui prouve que la valeur de l’argent y diffère de plus de moitié de celle qu’il a à Londres et à Edimbourg : de telle sorte que leur plainte est fondée sur la comparaison de deux quantités qui ne se peuvent comparer entre elles. Et quant à la quote-part des neuf dixièmes que les Uitlanders paieraient au Trésor public, que les Anglais nous permettent de leur rappeler deux choses : premièrement, qu’ils sont exonérés de tout service militaire, et qu’il est autrement grave pour les Boers de payer de leur vie et de la vie de leurs fils, qu’il ne l’est pour ces richards des mines d’or déverser tant pour cent sur leurs énormes dividendes ; ensuite, que personne ne les a appelés, qu’ils sont accourus de leur propre mouvement, et que, s’ils payent au Transvaal des milliers de francs, ils en retirent des millions. Ainsi, par exemple, en 1898, alors qu’ils avaient payé au Transvaal environ 70 millions de francs, ils exportèrent du Transvaal 500 millions en or. De plus, tandis qu’au Cap les impôts sur les denrées sont de 15 pour 100, au Transvaal ils sont de 10 pour 100 seulement. Au reste, jamais l’amour du Transvaal n’est entré dans leur cœur métallisé. Une fois les mines épuisées, ils disparaîtront, comme les vautours du champ de bataille. Il est vrai : ils ont expédié à Londres leur supplique monstre signée de 21 681 noms, mais ne sait-on pas que le président Krüger a fourni à sir Alfred Milner, lors de la conférence de Bloemfontein, des preuves, affirmées par serment, qu’une foule de ces signatures étaient fausses ; qu’il

  1. Grondwel, 1896. Art. 42 et 73.