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naturels, l’île d’Oléron, l’île de Ré et un seuil sous-marin situé au Nord du pertuis Breton, qui porte presque le même nom « Pen-Breton, » et s’étend de l’île de Ré à l’embouchure de la Sèvre. Les courans y sont assez faibles, la tenue des fonds excellente. On y trouve une profondeur de 3 mètres au-dessous du niveau des basses mers, à 200 mètres du rivage, de 5 mètres à 100 mètres plus loin. Il était donc possible, facile même, d’ouvrir un chenal de faible longueur permettant d’atteindre les grands fonds, et c’est ce qu’on a fait. Le port de la Pallice a été créé, et les ingénieurs ont pu tailler en plein drap. En tête, un avant-port de plus de 12 hectares, enfermé entre deux grandes jetées de près de 450 mètres chacune, creusé à la profondeur de 5 mètres au-dessous des basses mers, et pouvant par conséquent recevoir à toute heure de marée les remorqueurs, les bateaux pilotes et en général tous les navires ordinaires du commerce. Les transatlantiques d’un plus fort tonnage peuvent très bien attendre pendant quelques heures l’arrivée du flot dans la rade qui est parfaitement sûre. Au fond de l’avant-port, deux écluses de 22 mètres de largeur, l’une de 145 mètres, l’autre de 165 mètres de longueur, divisées toutes deux par des portes intermédiaires en deux sas plus petits, et manœuvrées par des cabestans hydrauliques. A la suite, un bassin à flot, qui a près de 700 mètres de longueur, un développement de quais de plus de 1 800 mètres et une surface de près de 12 hectares comme celle de l’avant-port. Le tout n’a pas coûté moins de 20 millions. C’est en réalité un port modèle au point de vue technique et hydrographique. Malheureusement on ne dirige pas comme on veut les grands courans commerciaux et le trafic y est encore très modeste.

Dans l’enthousiasme des premiers jours, on avait même ménagé la possibilité d’agrandir encore et de beaucoup le bassin en le prolongeant du côté du port actuel de la Rochelle, avec lequel il aurait été relié par un large canal maritime. Mais on est loin d’avoir obtenu les résultats espérés. Seule la Pacific Steam Company continue à y faire escale, comme elle le faisait avant la construction des appontemens de Pauillac. Bordeaux, Saint-Nazaire et le Havre ont conservé toutes leurs attaches avec l’Amérique et ne paraissent pas disposés à les relâcher de sitôt. Les pouvoirs publics, qui ont eu l’idée grandiose et généreuse d’établir à la Pallice un établissement maritime de premier ordre, se trouvent un peu dans la situation d’un entrepreneur de fêtes trop aventureux qui