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LA REPRÉSENTATION PROPORTIONNELLE
ET LE
RÉGIME PARLEMENTAIRE

La Chambre belge vient d’adopter, après des débats qui n’ont pas pris moins de trente-trois séances, un projet de loi qui applique aux élections législatives le principe de la représentation proportionnelle. Le problème que ce vote a tranché s’était posé, avec une intensité croissante, dès le lendemain de la révision constitutionnelle, qui, en 1894, avait substitué le suffrage universel, avec le correctif du vote plural, à un régime censitaire des plus restreints. Tous les partis admettaient l’impossibilité de maintenir un mode de votation qui faussait la sincérité du régime représentatif ; mais ils ne pouvaient se résigner au remède qui devait terminer la crise. Projets après projets succombèrent, à la Chambre, sous des coalitions parfois bizarres. L’un d’eux, il y a six mois, déchaîna l’émeute dans le parlement et faillit conduire le pays à une révolution. Deux ministères, issus de la majorité conservatrice, sont tombés successivement pour n’avoir pu résoudre l’énigme. Un troisième, plus heureux, a triomphé du sphinx. Le 1er juillet 1900, environ un million et demi d’électeurs, réunissant deux millions cent soixante-quinze mille suffrages et répartis en trente circonscriptions, auront à se partager proportionnellement cent cinquante-deux sièges de représentans et soixante-seize sièges de sénateurs.

C’est la première fois que l’application de la représentation proportionnelle est tentée sur une aussi grande échelle. Succédant aux essais qui ont été poursuivis en Suisse et ailleurs, l’expérience ne peut manquer d’intéresser tous ceux que préoccupe l’avenir des institutions représentatives. Ces questions, fastidieusement débattues pendant trois mois à la tribune du parlement