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nous suivre sans trop d’ennui, plus heureux encore si une main plus autorisée daignait reprendre notre humble tentative et, d’un ample coup de pinceau, donner un tableau de maître à la place de notre modeste esquisse, timidement crayonnée.


I

Les mathématiques pures comportent trois grandes subdivisions : arithmétique, algèbre, analyse infinitésimale. Nous dirons quelques mots des branches extrêmes, la seconde pouvant être considérée comme « soudée » aux deux autres : l’algèbre est un prolongement de l’arithmétique, ou une portion de l’analyse, suivant le point de vue.

Comment l’arithmétique, ou théorie des nombres, devait fatalement se constituer, c’est ce qu’il est bien aisé d’expliquer. Les simples multiplications et divisions auxquelles les plus jeunes enfans sont habitués ne sont pour eux que des exercices purement mécaniques. Or si l’on se sert bien aisément d’une montre sans avoir aucune idée de son mécanisme, voilé aux regards, il faut bien cependant qu’il existe quelque horloger connaissant à fond les rouages, sans quoi, au premier accident, la montre sera hors d’usage. Le géomètre était donc nécessaire pour édifier une théorie de ces calculs si simples à pratiquer, si délicats à bien raisonner. La logique de l’addition, de la soustraction, de la multiplication ayant été créée, l’on se trouvait, avec celle de la division, en présence d’une difficulté nouvelle : l’opération, en général, est impossible (exemple 10 : 3). De là la théorie de la divisibilité qui se pose le problème suivant : Etant donné un nombre entier, reconnaître a priori, d’après la forme de ce nombre, s’il est divisible par tel autre nombre. De la notion de divisibilité découle la notion de nombre premier. Ce sont les nombres tels que 2, 3, 5, 7, 11, 13… qui n’admettent aucun diviseur. L’on pourrait croire, n’est-il pas vrai, qu’en atteignant les nombres très grands tels que un million de millions et bien au-delà, ces nombres finiront bien par avoir tous, à partir d’un certain rang, au moins un diviseur, fût-il très petit, fût-il 2 ou 3… Eh bien, non, il n’en est pas ainsi : l’échelle des nombres premiers est illimitée, et c’est un théorème connu des élèves de rhétorique. Il y a donc là un caractère important pour la classification des nombres entiers, et pour la construction d’une « table des nombres premiers, » il eût