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relations économiques les unes avec les autres, à coordonner et à faire converger vers un but commun aussi bien les opérations militaires que les travaux de premier établissement. Ils correspondent à l’action d’un colonel.

Nous prévoyons l’objection : tout officier ne convient pas à ce double rôle, et le jeu seul du commandement des unités peut amener à l’administration territoriale des sujets qui n’y auraient aucune aptitude. Cela serait exact si tout corps d’occupation ne comportait pas deux élémens : l’un affecté à cette occupation régionale, l’autre formant les réserves, stationnées dans les grands centres, dans les ports, ou, si l’on veut, l’un de campagne, l’autre de garnison. Le second est tout préparé pour recevoir les officiers à qui le rôle d’administrateur ne convient pas ou qui ne conviennent pas à ce rôle. Néanmoins, il y a un intérêt de premier ordre à ce que, le commandement territorial, avec les hautes responsabilités politiques et morales qu’il comporte, ne soit pas à la merci d’un choix arbitraire, d’un « tour de service, » à ce que, en un mot, il échoie toujours au right man. Aussi a-t-on formulé le vœu que, dans la future armée coloniale, la désignation des cadres destinés au double commandement militaire et territorial fût entourée de garanties spéciales. Un des derniers gouverneurs généraux de l’Indo-Chine, M. Rousseau, avait vivement senti cette nécessité et, quand la mort l’a surpris prématurément, il se proposait d’étudier, de concert avec l’autorité militaire, les mesures nécessaires pour assurer à ce cadre une fixité relative et un recrutement d’élite.


L’un des caractères essentiels de cette organisation, telle que nous l’avons vu spécialement appliquer par le général Galliéni, c’est qu’elle ne suit pas l’occupation du pays, mais la précède.

Aussitôt l’occupation d’un territoire nouveau résolue pour des raisons politiques ou administratives, nous ne l’avons jamais vu procéder « par colonne en coups de lance » contre un objectif plus ou moins militaire, le souci de l’organisation restant réservé jusqu’à l’issue de l’opération ; au contraire, tous les élémens de l’occupation définitive et de l’organisation sont assurés d’avance ; chaque chef d’unité, chaque soldat sait que le pays qui va lui échoir sera celui où il restera, et chefs et troupes sont formés en conséquence. Et ainsi l’occupation successive dépose les unités