Page:Revue des Deux Mondes - 1899 - tome 156.djvu/210

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

4 kilos de chaux, les betteraves en prennent 20 kilos environ, le blé une dizaine, l’avoine un peu plus et, si on excepte les prairies artificielles, qui, les bonnes années, peuvent exiger une centaine de kilos par hectare, on voit qu’en général les quantités enlevées sont hors de proportion avec celles que la pratique agricole a reconnu avantageux de répandre. Il est curieux de constater notamment que des terres qui ne donnaient que des récoltes de froment misérables, en portent de bonnes quand elles ont été chaulées, et cependant les besoins de cette plante en calcaire sont extrêmement faibles ; très souvent, au reste, on chaule, ou on marne avec avantage des terres qui renferment assez de chaux pour subvenir aux besoins des récoltes ; les eaux souterraines enfin apportent parfois, même dans les pays granitiques, de petites quantités de chaux suffisantes aux récoltes, et cependant, dans ces contrées, le chaulage est pratiqué avec grand avantage.

L’introduction dans le sol d’un aliment végétal nécessaire n’est donc qu’une des causes de l’efficacité des amendemens calcaires ; ils modifient en outre les propriétés physiques et chimiques du sol, ils y créent un milieu favorable aux fermens qui y pullulent et déterminent leur fertilité ; les connaissances nouvellement acquises sur ce sujet sont encore peu répandues, et j’ai cru utile de les exposer ici.


I. — INFLUENCE DES AMENDEMENS CALCAIRES SUR L’APPROVISIONNEMENT D’EAU DU SOL

L’humidité est la condition même d’existence de la plante ; elle ne vit et ne s’accroît qu’autant que ses racines puisent dans le sol une quantité d’eau suffisante pour compenser la transpiration excessive que déterminent les radiations solaires. Les plantes herbacées sont des appareils d’évaporation, dont la puissance a été déterminée par de nombreuses expériences concordantes : pendant le temps qu’elles mettent à élaborer un kilogramme de matière sèche, le blé, l’avoine, le seigle ou la graminée de la prairie dépensent par leur transpiration de 250 à 300 litres d’eau et plus encore, si la terre n’est pas bien pourvue des alimens nécessaires à la vie végétale. Tant que les racines peuvent fournir à l’énorme dépense que déterminent les radiations d’un soleil éclatant, les plantes restent droites, rigides, et travaillent régulièrement, mais si les racines ne trouvent pas, dans les réserves du sol, de quoi