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morales, par la sympathie donnée à toutes les formes sous lesquelles s’exprime l’activité de l’homme ; elle est encore humaine parce qu’elle a le sentiment vif de ce qu’il y a de relatif dans la pensée, parce qu’elle croit que l’esprit, en dépit de sa perpétuelle jeunesse et de sa divine puissance, est assujetti à l’effort et à la souffrance. Mais si elle a ses assises et comme ses racines dans les couches profondes de l’expérience et de l’histoire, elle s’élève aussi d’un mouvement joyeux et facile vers l’immuable divin ; la vérité, la justice, la bonté, tout ce qui est d’ordre supérieur, d’ordre spirituel, c’est bien là ce que, de toutes manières, elle nous rend visible et palpable. M. Ollé-Laprune parle quelque part du dôme de Saint-Pierre où l’art ancien et l’art chrétien, la science architecturale et l’inspiration mystique, après bien des efforts et des essais, ont conspiré ensemble pour créer quelque chose d’unique en son genre. Ce dôme repose sur des fondemens solides et, avec ses lignes pures, harmonieuses, hardies, il monte vers le ciel en pleine lumière. Tel quel il nous fait invinciblement songer à cette philosophie où le divin et l’humain, le goût du relatif et le sens de l’absolu, l’antiquité et le christianisme, tant d’élémens de provenance diverse se fondent dans une harmonie supérieure ; il la symbolise merveilleusement. On peut dire d’elle exactement ce que M. Ollé-Laprune disait de cette coupole : elle est, non pas un effort démesuré pour atteindre l’inaccessible, mais un beau mouvement puissant pour aller, aussi haut que possible, chercher à la source ce que Dieu seul peut donner : la lumière, la paix, la joie rayonnante de la vérité.


ALBERT BAZAILLAS.