Page:Revue des Deux Mondes - 1899 - tome 155.djvu/881

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

était que les dissidens bâtissent un plus grand nombre d’écoles normales ou qu’ils envoyassent leurs novices aux écoles normales d’externes. La masse de la Chambre était très persuadée de la justice de cette cause et il fallut l’intervention de M. Balfour pour entraîner la majorité à repousser la motion de M. Lloyd Georges.

Pour nous, nous croyons en effet qu’il y a là une injustice et, puisque l’Etat paye plus des trois quarts des dépenses des écoles normales d’internes, il aurait le droit de leur imposer la clause de conscience, comme elle est appliquée à toutes les Ecoles primaires, en vertu de la loi de 1870.

Quant à la question dite religieuse, nous pensons que c’est plutôt une question de clocher, soulevée par le clergé anglican, afin de maintenir sa domination sur l’école primaire, comme sur l’Ecole normale. En effet, ni l’Eglise catholique romaine, ni l’Eglise méthodiste n’ont réclamé pour leurs ministres le droit d’enseigner leurs doctrines à l’école de bureau scolaire, si les parens n’ont fait appel à la clause de conscience ou demandé pour leurs enfans une instruction spéciale de la doctrine de leur secte. Un tel enseignement confié à des maîtres d’école anglicans assez jeunes pourrait être funeste à l’Eglise qui l’entreprendrait, car il risquerait de faire enseigner le dogme par des profanes. « Ce que les parens désirent pour leurs enfants, a dit très bien M. Richardson, c’est de faire d’eux des honnêtes gens, cette œuvre la plus noble de Dieu, plutôt que des théologiens capables de couper des cheveux en quatre ; c’est de leur enseigner à observer la sainte volonté et les commandemens de Dieu et à se conduire d’une manière conforme tous les jours de leur vie. Et pour cela, le Décalogue, le Sermon sur la Montagne et les paraboles de l’Evangile sont bien suffisans. »

Si, maintenant, nous essayons de conclure, nous dirons qu’en dépit de bien des incohérences, de l’indifférence des campagnards et des difficultés financières, le système de l’Ecole primaire anglaise offre l’image de la vie, du libre jeu des grandes forces sociales qui sont à l’œuvre en Angleterre : l’Eglise établie et les dissidens, l’Eglise catholique romaine, l’aristocratie anglicane et la démocratie radicale des grandes villes.

Sans doute, il y a souvent des frottemens, parfois des luttes très vives entre ces différens pouvoirs, qui se disputent l’éducation des générations futures. Mais cette lutte n’est-elle pas la