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couvre le buste, avec beaucoup de colliers. Elle a toujours des fleurs sur la tête avec des bijoux sur le côté de son épais chignon haut monté. Elle se couvre la figure d’une poudre jaune, faite d’une écorce broyée, qu’il faut écraser et réduire pendant des heures ; on la mêle dans l’huile, et cette couleur dorée lui sert de fard. Elle fume de gros cigares, longs de 23 centimètres sur 2 centimètres et demi de diamètre, faits de tabac et de sciure de bois mélangés. On dit ces cigares assez doux, mais ils sont d’une odeur déplaisante.

Habituée à l’indépendance, la Birmane circule librement et tient une place importante dans la vie. Il est vrai qu’elle ne mange pas avec l’homme et qu’elle commence par le servir le premier. Elle est la ménagère, tout comme la paysanne dans nos campagnes qui sert elle-même les hommes avant de prendre son repas. Depuis quelque temps cependant, dans les classes qui sont un peu élevées ou en contact avec les métis et les Européens, la femme prend place à table à côté de l’homme.

La Birmane a beaucoup plus d’initiative et d’énergie que le Birman ; elle a conscience de sa valeur et prend vite la suprématie dans le ménage. Quand elle devient veuve, elle est le chef de la famille et l’administratrice des biens jusqu’à ce que les enfans demandent leur part. Elle est maîtresse du bien qu’elle a apporté, et, dans la classe inférieure, elle ne verse pas à la communauté ses profits personnels. Elle a sa bourse propre et reste seule propriétaire de ses économies. Elle réussit à merveille dans le commerce : mariée à un Chinois, à un Yunnanais, à un Shan, elle fonde partout de riches maisons.

Le divorce a toujours été reconnu par la loi. Il est fréquent dans le peuple, où chacun des deux époux n’a qu’à reprendre sa bourse ; mais, il est plus rare dans la classe élevée. La femme qui divorce ne peut opérer sa reprise, s’il y a eu faute de sa part, ce qui est fort rare, dit-on. En ce cas, elle doit s’en aller avec son corps et son habit, selon la formule du juge. La fréquence des divorces ne doit pas être attribuée à l’excessive ardeur d’un tempérament tropical ; hommes et femmes ont au contraire des sentimens très calmes. La séparation est presque toujours provoquée par la question d’argent, le plus souvent l’amour du jeu chez les hommes les excite à vouloir gaspiller l’argent gagné par la femme.

La Birmane a les allures libres, elle a l’intelligence vive, de