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le mouvement, le coup d’archet des maîtres, et de tous les poètes du premier Empire et du commencement de la Restauration, il est le seul, après Millevoye, qui fasse songer à Lamar- tine, en ayant le mérite de l’avoir devancé[1]. Sainte-Beuve dit qu’il fut un intermédiaire entre l’auteur de la Chute des Feuilles et l’auteur du Lac, mais beaucoup plus rapproché de ce dernier par l’élévation et le spiritualisme habituel des sentimens. L’observation est juste. Millevoye est un païen, Loyson est un chrétien. Et l’on n’a qu’à comparer l’Ode à Byron, de Lamartine, aux Épîtres de Loyson à Victor Cousin, à Royer-Collard[2], à Maine de Biran

  1. Et dans ses dernières poésies, dans l’Hymne à la lune, notamment, Loyson côtoie les Harmonies de plus près encore :

    Quel est donc le secret de cette sympathie ?
    Que me veux-tu, globe argenté ?
    Qu’ont, dis-moi, de commun ton errante clarté
    Et ces mystères de la vie.
    L’inflexible destin qui la tient asservie,
    La naissance et la mort, l’amour et la beauté,
    Et la stérile fleur de la virginité.
    Et cette tristesse infinie,
    Le titre des mortels à l’immortalité ?
    ……………….
    Mais tout à coup parmi ces brillantes merveilles,
    Quel son majestueux a frappé mes oreilles !
    Sous ces dômes resplendissans.
    J’entends cette parole, incréée, éternelle,
    Le Verbe, fils de l’Être, la vie universelle,
    Flambeau de vérité, qui brille avant les temps :
    Dieu présent à l’esprit, Dieu caché pour les sens,
    Ton silence, ô nuit sainte, est sa vois solennelle,
    Et tes astres muets répètent ses accens.
    O terre, ô ciel, ô monde, ô région nouvelle,
    O de l’intelligence immuable cité !
    Poursuis ton vol, âme immortelle
    Ton domaine est l’immensité.

  2. Des systèmes menteurs laissons donc l’imposture,
    Pour consulter en nous la voix de la nature.
    J’interroge mon cœur. Hors de lui, comme en lui.
    Mon cœur trouve partout un éternel ennui ;
    Soit que cherchant un bien dont l’image m’abuse,
    Que tout semble m’offrir et que tout me refuse,
    Rassasié sans cesse et jamais satisfait.
    Il ne me reste enfin qu’un impuissant regret
    D’avoir été trompé tant de fois, et peut-être
    Un regret plus cruel de ne pouvoir plus l’être ;
    Soit qu’après tant d’erreurs seul je revienne à moi,
    Et que me contemplant d’un regard plein d’effroi.
    De mon vide infini je sonde l’étendue.
    C’est ainsi, malheureux, que mon âme éperdue
    S’égare sans secours dans une épaisse nuit.
    Et se lasse à poursuivre une ombre qui me fuit.