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la troisième commission, la déclaration suivante : « Il est entendu que le recours aux bons offices, à la médiation, aux commissions d’enquête et à l’arbitrage est purement facultatif et ne saurait, en aucun cas, revêtir un caractère obligatoire ou dégénérer en intervention ; le gouvernement impérial aura à juger lui-même les cas où ses intérêts lui permettraient d’admettre ces moyens, sans que son abstention ou son refus d’y avoir recours puisse être regardé par les États signataires comme un acte peu amical. Il va de soi qu’en aucun cas, les moyens dont il s’agit ne pourraient s’appliquer à des questions d’ordre intérieur. » Il va de soi, faut-il ajouter, que cette manifestation ne modifie en aucune manière les rapports antérieurs de l’Europe avec la Turquie, issus des traités et cimentés par la force des choses.

Un autre diplomate, le comte Nigra, avait expliqué, dès le 14 juillet, pourquoi il croyait devoir accepter sans répugnance les instructions irréductibles de l’Allemagne. Les cas d’arbitrage obligatoire énoncés dans l’article du projet russe étaient à ses yeux « si misérables qu’il ne valait pas la peine d’en parler. Pour un si pauvre résultat, il ne fallait pas mettre en péril l’heureuse unanimité qui faisait la force du comité devant la troisième commission. » Ce raisonnement nous paraît faible.

D’abord, si le résultat était si pauvre, pourquoi le gouvernement allemand rompait-il l’unanimité ? pourquoi donnait-il à son délégué des instructions impératives, irréductibles ? Puisqu’il les donnait, il y avait un intérêt à les donner.

Puis, en fait, plusieurs de ces dispositions avaient une réelle importance. Sans parler des difficultés suscitées par les conventions relatives aux fleuves internationaux et aux canaux interocéaniques, n’était-ce rien que de prévenir par des arbitrages obligatoires les contestations relatives à des dommages pécuniaires, alors même qu’elles ne portaient que sur la fixation des indemnités, les litiges issus des conventions de délimitation et d’extradition, des conventions concernant les secours aux malades et aux blessés en temps de guerre, etc. ?

Enfin ce qui importait par-dessus tout, c’était d’introduire ce nouveau principe dans le droit international. On avait procédé, d’après le comte Nigra, avec un excès de circonspection : soit. Ce qui importait par-dessus tout, c’était de faire cette brèche dans l’ancienne loi des nations, de poser et d’imposer cette maxime nouvelle : il y a des litiges internationaux dans lesquels l’appel