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la transaction intervenue en juin dernier entre le vice-roi Chang-Chih-Toung et le gouvernement japonais : celui-ci consent directement au vice-roi un emprunt de 30 millions pour étendre et mettre à la hauteur des progrès modernes les forges que Chang avait installées à Hanyang près d’Hankéou ; la direction de ces mines devra être confiée à une compagnie et à des ingénieurs japonais. Le célèbre mandarin renonce ainsi définitivement à son rêve chimérique de la construction exclusive des chemins de fer chinois à l’aide de rails fabriqués en Chine, par des Chinois, avec des capitaux chinois. Quoiqu’il y ait encore quelque différence entre un ingénieur japonais et un ingénieur européen, il n’y a aucun rapport entre une administration japonaise et une administration chinoise, et il semble que les forges d’Hanyang aient des chances de prospérer sous cette nouvelle direction.


IV

En 1905 ou 1906, s’il ne survient aucun trouble politique grave d’ici là, la plupart des chemins de fer aujourd’hui concédés seront achevés ; quelques mines, au moins une partie de celles du Peking Syndicate, seront, on peut l’espérer, entrées en exploitation, quoique, même pour ces dernières, il n’y ait encore de fondée qu’une société d’études, et qu’il y faille beaucoup de capitaux ; la navigation à vapeur, sur les cours d’eau de l’intérieur, aura été facilitée sans doute par une réforme plus libérale des règlemens ; enfin le likin, le plus grand de tous les obstacles au développement du commerce, sera, dans l’une des plus riches parties de l’empire, administré par des Européens, et aura cessé ainsi d’être oppressif ; les chemins de fer auront sans doute contribué à diminuer partout ses inconvéniens. Bref, l’air vivifiant du dehors aura commencé de pénétrer dans cette atmosphère confinée où vivait la Chine ; elle sera dotée d’un commencement d’outillage européen, suffisant pour affecter déjà sérieusement les conditions de son existence, sans produire toutefois la dangereuse commotion qu’aurait pu faire naître une trop brusque et trop universelle invasion des méthodes de l’Occident. À ce titre on ne saurait trop se convaincre des avantages d’une pénétration graduelle.

Ce commencement de transformation sauvera-t-il le Céleste Empire du démembrement ? Puisque c’est le désir d’exploiter ses ressources que les nations étrangères ont toujours présenté comme