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Sur les bancs cannés des wagons de première classe on avait assez peu de voisins et la place y était suffisante pour qu’à côté des voyageurs on entassât tous leurs bagages, malles comprises ; les secondes, où l’on ne payait que 3 centimes et demi par kilomètre, au lieu de 5 en première, étaient déjà mieux garnies ; mais de simples wagons à marchandises étaient bondés de Célestes en déplacement.

À ce moment les recettes n’atteignaient pas moins de 300 taëls par jour, soit plus de 1 000 francs au change d’alors. Ce chiffre correspond à une recette brute de 30 000 francs par kilomètre et par an, supérieure à celle de la moyenne des chemins de fer français. Aussi posait-on déjà une seconde voie sur cette ligne à peine terminée, et où des affiches placardées dans les gares annonçaient encore que les voyageurs n’étaient transportés qu’à leurs risques et périls, sans responsabilité de l’administration. Depuis lors le trafic s’est encore accru. D’après M. Kinder, chef de l’exploitation, l’exploitation des 480 kilomètres du réseau du Tchili, y compris un prolongement de 65 kilomètres au nord de la Grande-Muraille rapporterait aujourd’hui 2 millions de taëls ou 7 millions de francs, soit 14 600 fr. par kilomètre et par an, et coûterait 1 200 000 taëls (4 200 000 fr.), soit 8 750 fr. par kilomètre. Les Chinois s’en servent avec ardeur, non seulement pour se déplacer eux-mêmes, mais pour le transport de toutes leurs denrées. « Des fruits de Pékin, dit le commissaire européen des douanes, sont déjà envoyés par chemin de fer à Takou pour être embarqués vers le sud et inversement. » Parfaitement construite, en un an, par des ingénieurs anglais et américains qui en dirigent encore l’exploitation au point de vue technique, la ligne appartient à l’Etat chinois, et l’administration en était entre les mains grasses de fonctionnaires indigènes, qui ne laissaient parvenir au trésor impérial qu’une bien faible partie des recettes. Tout le personnel : employés des gares, contrôleurs, hommes d’équipe, est Chinois, à l’exception des mécaniciens qui sont Européens ou Américains. Ces derniers mêmes ne tarderont pas à être remplacés par des Célestes. Sur les chemins de fer japonais, il n’existe plus un seul employé européen, et au Tonkin, sur la petite ligne de Phu-lang-Thuong à Langson. j’ai été conduit par des mécaniciens indigènes : or, à tous les points du vue, les Annamites sont très inférieurs aux Chinois. Il n’est pas douteux que ceux-ci pourront remplir excellemment une tâche qui exige surtout ces