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intérêt les pages consacrées à Maupassant et à Barbey d’Aurevilly, qui sont choisis pour représenter parmi nous les peintres de la femme. Ce dernier surtout lui inspire une admiration sans borne, au point qu’elle est tentée de revendiquer pour son compatriote le romancier normand, descendant des compagnons du duc Rolon.

La conclusion de : Nous autres Femmes et nos Poètes, est d’une courageuse netteté. — L’œuvre de l’homme viril est œuvre d’homme ; celle de l’efféminé, œuvre de mode ; celle du demi-homme, demi-œuvre. Ce que nous demandons à nos compagnons, nous autres femmes, c’est qu’ils soient réellement virils, rien de plus. Car l’homme complet développe seul en nous la femme complète. Les auteurs dont l’influence sera durable, continue-t-elle avec une courageuse sincérité, Keller, Maupassant, Barbey, n’ont pas écrit pour notre sexe, ni songé outre mesure à ce que nous penserions de leurs livres ; c’est pourquoi ils nous ont comprises. Ceux dont la jeunesse s’est écoulée vers le milieu du siècle, Bjoernson, Ibsen, Heyse, Tolstoï, ont écrit spécialement à notre intention. Ils nous ont donné la permission d’être à notre choix docteur, professeur ou grande dame. Ils ne nous ont défendu qu’une vocation, mais c’est la seule qui nous convienne : nous voulons être « les constructrices des générations à venir, à qui rien d’humain n’est étranger (suivant la belle expression de Térence), parce qu’elles portent toute l’humanité future dans leur sein. »


III

Les œuvres originales de Mme Marholm sont agréables sans doute, mais n’ont pas une portée comparable à celle de son œuvre critique. Nous leur demanderons toutefois les élémens nécessaires à la recherche que nous voulons tenter on terminant cette étude : celle des conseils réellement pratiques donnés par leur auteur et de la leçon qu’on peut tirer de ses écrits.

Lily jeune fille, épouse et mère se présente comme une agréable série d’esquisses, offrant par fragmens détachés quelques épisodes de la vie d’une femme honnête et aimante. Ces pages font songer à Gustave Droz, l’auteur jadis applaudi de Monsieur, Madame et Bébé. Nous y trouvons dès le début quelques portraits amers de vieilles filles maladives et déséquilibrées. Par bonheur, l’héroïne, qui semble d’abord réservée au même destin, se voit