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certains indices, comme la diminution des livraisons en Europe et la fermeture d’usines de sulfate de cuivre, indiquent un refus des acheteurs de ratifier les cours actuels, cette hausse énorme des prix ne paraît pas avoir jusqu’ici ralenti la consommation. Les expéditions de charbon des trois grands districts houillers de l’Allemagne, Ruhr, Sarre, Silésie, ont été de 2 673 000 tonnes dans la première quinzaine de mai 1899, contre 2 517 000 en 1898. La plupart des manufactures sont pourvues de commandes pour de longs mois et rien ne fait prévoir le ralentissement du mouvement, au moins d’ici à l’Exposition universelle qui doit s’ouvrir à Paris en 1900.

Cette activité a eu son point de départ en Allemagne, dont l’essor économique date du lendemain de ses victoires de 1870 : la métallurgie, et à côté d’elles une foule d’autres industries, y ont prospéré[1]. Elle travaille au maximum, c’est-à-dire qu’elle cherche à produire le plus qu’elle peut, et qu’elle trouverait à vendre davantage si elle pouvait forcer sa production, qui a dépassé 7 millions de tonnes de fonte pour l’année 1898. C’est surtout le coke qui lui manque, bien qu’elle en ait produit plus de 7 millions de tonnes en 1898 dans le seul district de Dortmund, et que plus de 500 fours à coke nouveaux soient en construction, qui d’ici à un an livreront 120 000 tonnes. Les charbonnages rhénans ne peuvent augmenter brusquement leur extraction ; ils manquent à cet effet d’ouvriers : ceux qu’ils pourraient faire venir de la Pologne, ne sachant généralement pas lire et écrire l’allemand, ne sont pas admis par l’administration : il faudrait aussi, en maints endroits, construire des habitations ouvrières. La hausse des salaires a pour effet de diminuer le travail des mineurs, qui, une fois une certaine somme gagnée, cessent l’abatage. En tout cas, pour augmenter la production, qui a été en 1898 de 44 millions de tonnes de charbon, il faut foncer de nouveaux puits, faire des traçages, des développemens, qui sont l’œuvre de mois et même d’années. Cette demande urgente de charbons est d’autant plus remarquable que les deux derniers hivers ont été très doux. Le syndicat allemand des cokes a fait des ventes à prix fermes jusqu’à la fin de 1900. Le syndicat de la fonte a dû réduire les ordres conditionnels qu’il avait acceptés pour le second semestre 1899, en fer puddlé et en fer aciéreux. De nouveaux

  1. Voyez dans la Revue du 15 février 1898 notre étude sur L’Industrie allemande.