Page:Revue des Deux Mondes - 1899 - tome 154.djvu/485

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
UN HOMME D’ÉTAT ESPAGNOL

EMILIO CASTELAR

I
LES ANNÉES DE JEUNESSE

« Messieurs, à cette tribune, j’ai représenté maintes fois la conscience de la nation. » Castelar disait vrai, le jour où, approchant de la fin de sa carrière, il se rendait ce fier témoignage, à cette tribune des Cortès où sa parole avait retenti si souvent comme la voix de l’Espagne des temps nouveaux. Oui, maintes fois, durant le demi-siècle où il n’a cessé de prêcher, de lutter pour l’idéal de sa vie entière : la liberté, il a été vraiment la voix et la conscience de l’Espagne nouvelle ; — conscience inquiète, éperdûment vibrante aux souffles orageux venus d’au-delà des monts ! Espagnol, — et qui donc l’a été jamais davantage ? — Espagnol par le sang qui courait dans ses veines, par l’amour passionné qu’il avait voué à son noble pays, par la magie de cette éloquence castillane dont l’enchantement, sur ses lèvres et sous sa plume, fut incomparable, il était en même temps par les idées un fils de la France, j’entends de la France sortie de la Révolution. Elle a été l’éducatrice, l’initiatrice de sa pensée.