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mission Foureau et moins difficile. D’après ses récits, « il existe, dans cette région, des localités où l’eau est abondante, où les palmiers poussent vigoureusement. Le capitaine Pein a visité l’une d’elles, qui avait plusieurs kilomètres d’étendue. Il serait possible d’y faire des cultures à l’abri des dattiers. Mais l’insécurité du pays est trop grande, et les Touareg ne se soucient guère de cultiver pour les autres. Aussi se contentent-ils, le moment venu, « de récolter les dattes de leurs palmiers sans prendre aucunement soin de ces arbres[1]. » Cette description, il est important de se le rappeler, ne s’applique pas au Sud algérien, où il ne se rencontre pas de Touareg, mais à la région saharienne plus méridionale comprenant le plateau du Tassili. Ainsi le manque d’eau n’apparaît nullement comme un obstacle.

Ni l’étendue de la ligne à exécuter, ni la nature des lieux ne sont donc de nature à inquiéter ou à décourager. L’œuvre apparaît comme de proportions modestes et d’une exécution relativement aisée. Serait-ce la dépense qui pourrait faire hésiter ? Peut-être, il y a vingt ans, en eût-il été ainsi. Aujourd’hui, on a fait de très grands progrès dans la construction des chemins de fer en pays neufs. J’ai suivi de près la construction d’une ligne en région désertique, débouchant dans le Sahara septentrional, la ligne de Sfax à Gafsa et aux grands gisemens de phosphates Sud-tunisiens ; j’ai été la visiter ; le succès de cette ligne a contribué à me faire reprendre l’idée du chemin de fer transsaharien. On a construit en dix-huit mois et moyennant 60 000 francs par kilomètre, y compris un matériel des plus importans, destiné à pourvoir à un trafic de 350 000 à 400 000 tonnes, les 250 kilomètres de Sfax aux mines de phosphates, à travers une contrée désertique sur la moitié du parcours. A l’heure actuelle, on trouverait des concessionnaires à 65 000 francs le kilomètre, matériel compris, pour les 370 kilomètres de Biskra à Ouargla ; pour le tronçon suivant, qui se ferait en pays presque plat, de Ouargla à la chaîne du Tindesset, sur un parcours de 600 kilomètres environ, en rehaussant le coût de 10 000 francs, ce qui le porterait à 75 000 francs, il est probable que l’on aboutirait ; la traversée du plateau du Tassili, quoique à partir d’Afara on se trouve sur un terrain qui ne présente plus de hauts reliefs, pourrait, sur 400 kilomètres, coûter une centaine de mille francs ; ensuite on redescend graduellement jusqu’au puits d’Asiou, et la traversée du Sahara méridional semble ne

  1. Comité de l’Afrique Française, Bulletin mensuel, juin 1899, p. 177.