de l’œil, et, en général, dans les divers tissus conjonctifs. Le globule blanc se meut à travers l’enchevêtrement des fibres connectives, comme un animal très souple dans le fouillis broussailleux d’une forêt vierge. Il s’étire pour passer par tous les pertuis et s’aplatit pour se glisser dans tous les interstices : son noyau, seule partie qui n’est ni étirable ni plastique, semble conformé, selon la juste remarque de M. Metchnikoff, pour créer le moins d’embarras possible à ces migrations. Au lieu d’être massif, il est formé d’un cordon cylindrique, dont l’aspect rappelle, suivant une image grossière, une chaîne de boudins enroulés, chaîne qui se développe dans les étroits passages.
Ce sont donc des phagocytes qui sortent des vaisseaux vers les parties enflammées. Mais contrairement à ce que croyait Cohnheim, ils ne viennent pas tous de là. Il y a aussi des cellules migratrices du tissu conjonctif. Il y a enfin des cellules fixes qui, comme une sorte de réserve territoriale, se mobilisent à leur tour. Tout au moins, s’ils ne partent pas eux-mêmes en campagne, ils y envoient leurs fils ; ils engendrent, en effet, selon le besoin, une postérité de phagocytes mobiles.
Ce n’est pas seulement chez les animaux supérieurs, chez l’homme, chez les mammifères, que l’on rencontre ces élémens errans, si remarquables ; c’est à tous les degrés de l’échelle. Les globules rouges du sang qui ont si longtemps accaparé l’attention des observateurs n’existent que chez les vertébrés et seulement dans leur sang : les leucocytes, eux, existent partout, chez les vertébrés à sang rouge et chez les invertébrés à sang blanc, et dans tous leurs tissus. L’universalité de ces élémens explique le grand intérêt qu’il y a à les bien connaître, et les études innombrables dont ils ont été l’objet. Partout ils présentent les mêmes caractères essentiels ; dans le liquide cavitaire de l’écrevisse, dans le sang de l’escargot, chez les astéries parmi les échinodermes.
Et d’ailleurs, ces élémens nomades ressemblent plus à des êtres libres qu’aux autres cellules vivant en société qui composent le corps des animaux. Leur histoire est sensiblement la même que celle des organismes mono-cellulaires nus, tels que les rhizopodes, les infusoires flagellés, et même les bactéries, et les microbes.