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a, encore aujourd’hui, son mot à dire en cette affaire. L’article 291 dort ou ne dort pas, selon le bon ou le mauvais vouloir du gouvernement, qui l’applique s’il veut, quand il veut, à qui il veut : et c’est ce qu’on appelle la loi. D’où il suit que l’association vit ou ne vit pas, selon le bon ou le mauvais vouloir du gouvernement, qui l’autorise rarement, — car il lui faudrait prendre une responsabilité ! — mais la tolère, s’il veut, quand il veut, autant qu’il veut : et c’est ce qu’on appelle la République. Pour être justes, ajoutons tout de suite que le ministère lui-même a senti le ridicule et le danger d’une telle situation, et qu’un projet de loi sur les associations, d’initiative gouvernementale, est soumis au Conseil d’État qui s’ingénie à le rendre prochainement présentable. Ce projet nouveau, nous n’avons pas à le juger, et du reste nous ne le connaissons que par une indiscrétion, ce qui permettrait toujours de nous objecter que nous ne le connaissons pas. Nous en savons assez peut-être pour craindre que la loi en élaboration ne soit, elle aussi, — au moins en ce qui concerne certaines associations, — plus léonine, de la part de l’État, que libérale ; mais ce n’est pas le moment de le démontrer ; et il suffit de constater ici que, le projet n’étant pas encore déposé à la Chambre, il s’écoulera du temps, — avec les aptitudes qui éclatent, les sages dispositions qui règnent, et les bonnes méthodes qui sont en honneur dans le parlement, — avant qu’il soit voté, promulgué et devienne loi. En attendant, qu’on se le dise ; l’article 291 du Code pénal existe, et par conséquent, comme nous le posions en principe, le droit d’association n’existe pas.

Sans nous attarder à choisir entre les divers systèmes que les savans ont inventés pour le classement des associations : associations naturelles et associations volontaires ; associations de droit privé et associations politiques ; associations permanentes ou nécessaires et associations temporaires ou accidentelles ; associations professionnelles, à but lucratif et associations intellectuelles ou morales à but désintéressé, convenons que nous aurons surtout et d’abord en vue les associations professionnelles, les associations volontaires, privées, permanentes, et en un certain sens nécessaires. Toutes ces associations, c’est dans l’État moderne, en face de cet État et par rapport à lui, que nous voulons les considérer, dans l’État de demain économique et politique, dont précisément, de l’aveu des théoriciens les plus accrédités, « le caractère fondamental, » comme « l’élément essentiel,