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aussi habile que M. Ducretet. Sa mise en scène est d’un effet immanquable. On ne peut se défendre d’un sentiment de surprise lorsque, en ouvrant la porte d’une salle entièrement close et inhabitée, coupée de toute communication avec le dehors, on y trouve imprimé, sans le secours présent d’aucune main humaine, le télégramme émané d’une pensée lointaine et qui est venu à travers les murs, l’espace, et les obstacles. Il est bien curieux aussi de voir la salle plongée dans les ténèbres s’illuminer subitement à un commandement lointain, à un ordre qui semble tombé du ciel.


IV

Ce système de télégraphie sans fil, à côté de ses avantages, n’est pas sans présenter quelques inconvéniens. Avant tout, le public lui a reproché un vice fondamental, auquel il faudra remédier tout d’abord. Le secret de la transmission n’est plus garanti. Tout poste récepteur installé dans le voisinage des stations existantes ou dans l’intervalle qui les sépare pourra recueillir les signaux transmis.

À la vérité, l’inconvénient n’est pas moindre dans le système actuel et l’on y remédie par l’adoption d’un langage conventionnel plus ou moins difficile à déchiffrer.

Il y a plus : non seulement la transmission peut être détournée, mais elle peut être troublée. Une émission d’ondes provenant d’un appareil quelconque peut brouiller les signaux que l’on voudrait recueillir. Le tube radio-conducteur répond à toutes les ondes quelles qu’elles soient, d’où qu’elles viennent. Il est trop banal.

Il faudrait que le récepteur ne fût sensible qu’aux seules oscillations parties du transmetteur; ou, au moins, qu’il y fût plus sensible qu’à toutes autres. Les ondes étrangères, écartées par l’obtusion de l’appareil à leur égard, ne causeraient plus de perturbations. D’autre part, les ondes propres à l’instrument, trop faibles pour agir sur un poste quelconque, ne pourraient plus être détournées. La condition n’est pas impossible à remplir. Le principe en a été nettement posé par M. L. Poincaré. L’oscillateur du poste de départ produit des ondulations dont la durée dépend des conditions de la construction. Le tube de Branly, au poste récepteur, est sensible à cette série de vibrations, à peu près comme à toute autre. Or, si ce radio-conducteur était associé à un appareil syntonique à l’oscillateur, impressionnable au même nombre de vibrations, résonnant avec lui, il est probable que le captage serait plus facile. Il faudrait une moindre énergie pour le