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L’ART RELIGIEUX
AU
XIIIe SIECLE


L’Art religieux du XIIIe siècle en France. — Étude sur l’iconographie du moyen âge et sur ses sources d’inspiration ; par M. Emile Mâle.


Le sens des cathédrales a été longtemps perdu. Quand la Renaissance eut passé sur la terre française, l’art des siècles chrétiens, touché par le souffle qui rappelait à la vie l’art des temps païens, rentra dans le mystère de la mort, et, dédaigné des artistes, il ne fut plus, pour les savans ou les rêveurs, qu’un hiéroglyphe. Les rares curieux qui, au XVIIe ou au XVIIIe siècle, s’essayaient à lire le grimoire des sculptures et des vitraux, y épelaient naïvement des noms historiques ou des paroles magiques qui traduisaient seulement leurs études ou leurs systèmes. Les bénédictins, comme Montfaucon, reconnaissaient dans les statues couronnées, qu’ils voyaient rangées aux galeries hautes des façades ou adossées aux colonnes des portails, autant de rois de France. Les théosophistes de la Révolution déchiffraient sur les tympans des portes de Notre-Dame l’histoire de Bacchus ou les cycles d’un mythe solaire; et Claude Frollo, l’archidiacre romantique, en cherchant parmi les sculptures de sa cathédrale le secret de la pierre philosophale et l’histoire arcane du Grand Œuvre, ne faisait que reproduire les visions de tel hermétiste du XVIIe siècle.

Il était puéril, à coup sûr, de rabaisser les édifices dont la masse dominait des villes populeuses au rôle d’un manuel d’histoire profane ou de sciences occultes. Tout un monde de pierre