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« Eh bien! monsieur Cuvier, disait-il à ce célèbre naturaliste, vous venez donc de disséquer le caïmacan? — Oui, monsieur, répondit Cuvier, et j’attends au premier jour le grand vizir. » (Il s’agissait du caïman envoyé de Saint-Domingue par le général Leclerc.)

Dans la séance de l’Institut où l’on nomma les associés étrangers, l’astronome Jeaurat s’approcha d’un groupe d’artistes. « Je ne sais pas, leur dit-il, pourquoi l’on nomme cet Herschel et pourquoi l’on fait tant de bruit de sa planète : il y a vingt ans que je l’avais découverte, et je n’avais même pas osé en parler. »

Le célèbre helléniste Villoison vient de chanter en latin un autre astronome, le glorieux Jérôme La Lande. Tous les amis de Villoison en sont affligés, ainsi que de la conduite qu’il a tenue pour arriver à l’Institut et depuis qu’il y est arrivé. Il venait d’achever une leçon à la bibliothèque, et, sortant avec ses collègues, il leur demanda où ils allaient? — « Signer pour le Consulat de Bonaparte. — Comment ! vous aussi, vous allez lui donner vos voix, je vous réponds qu’il n’aura pas la mienne. — Comme il vous plaira, mais vous pourriez bien perdre votre place. » Villoison ne répliqua pas, mais il ne se le fit pas dire deux fois. Ces messieurs montent en voiture, se rendent à l’Institut et trouvent qui? Villoison lui-même tout suant, tout poudreux, qui les avait devancés à pied, tant la peur et l’intérêt donnent des ailes. Ses collègues qui l’avaient malignement effrayé se moquèrent de lui tout à leur aise… Et combien de votes de ce genre pour le Consulat de Napoléon !

Toutes les feuilles ont parlé du mariage de l’abbé Delille et des dispenses qu’il a obtenues du Pape pour le contracter; cependant l’homme qui doit être le mieux au fait de l’histoire et des affaires de ce poète assure qu’il n’a point demandé des dispenses au Pape, parce qu’il n’en avait pas besoin, n’ayant jamais été dans les ordres. On ajoute que tous ces articles de gazettes ne sont qu’une petite manœuvre de M. Talleyrand qui voudrait s’étayer de l’exemple d’un homme comme l’abbé, qui est très aimé du public.


Paris, le 26 septembre 1802.

Ce qui caractérise [ordinairement les grands hommes d’État, c’est le secret impénétrable dans lequel ils ont soin d’envelopper leurs vues et leurs projets. Tout est mystère autour d’eux. Tout