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Chinoises. Il fallut pourtant qu’il traçât la figure. Après quoi on le renvoya et on travailla à la mascarade[1]. »

C’était un insigne honneur que la duchesse de Bourgogne faisait à Mme la Chancelière, en acceptant ainsi d’aller au bal chez elle. Ceux que le Roi et les princes lui offraient à Versailles auraient pu satisfaire à contenter son goût pour la danse. Il est fréquemment question de ces bals dans le Journal de Dangeau. C’était le plus souvent ce qu’on appelait des mascarades, car le mot se prenait alors dans une acception un peu plus noble qu’aujourd’hui. La première mascarade avait été organisée sur la demande du Roi lui-même pour le jour de naissance de la duchesse de Bourgogne, qui entrait dans sa quatorzième année. Cette mascarade eut lieu le 6 décembre 1698 à Versailles, dans l’appartement de Mme de Maintenon. Le duc de Bourgogne était Apollon, la duchesse de Bourgogne et ses dames les neuf Muses. Le 21 janvier suivant, ils se masquèrent encore tous deux, et firent masquer les dames du palais avec eux. Même divertissement le lendemain 22. Cette fois, il semble qu’il se soit agi de ce que nous appelons une redoute, c’est-à-dire d’un de ces bals masqués où chacun s’efforce de dissimuler sa personnalité sous un costume uniforme. Le 4 février, il y eut un grand bal à Marly, puis, de nouveau, mascarade le 5. « Le Roi, raconte Dangeau[2], a fait apporter ici grand nombre d’habits de masque, et on n’en refuse point à ceux qui veulent se masquer. On leur donnoit à choisir. » Le Mercure qui rendait compte de ces fêtes, tout comme font les journaux de nos jours, ajoute ce détail : « Pendant le bal, les danseuses disparaissoient par troupes, et s’alloient masquer dans les appartemens hauts, tous remplis d’habits, et il y en eut plusieurs qui se masquèrent jusqu’à quatre et cinq fois chaque soir. » Enfin, tous ces divertissemens furent couronnés par trois journées consécutives de mascarades, que signalèrent particulièrement des entrées de Siamois, des danses de Basques et des danses à la Vénitienne. « Ce divertissement, ajoute encore le Mercure, a été complet, parce qu’outre ces mascarades, il y a eu bal tous les jours, et que rien n’a manqué de tout ce qui peut plaire aux yeux, flatter l’oreille et satisfaire le goût[3]. »

Bals et mascarades n’étaient pas les seuls plaisirs qui fussent

  1. Lettres historiques et galantes, t. I, p. 255.
  2. Dangeau, t. VII, p. 30 et passim.
  3. Mercure de France, février 1699. p. 199.