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faites de dalles réfractaires, sont chargées d’une couche de 10 centimètres de poudre en ignition. Une fois par jour on ouvre la porte, on retire de la partie inférieure une cendre fine comme celle d’un cigare, et l’on fait descendre d’un étage la poussière de fou qui couvre chacune des trois dalles, en la poussant avec un râteau par des trous aménagés à cet effet. La tablette supérieure, demeurée vide, est alors garnie de combustible neuf ; l’opération dure dix minutes et se renouvelle seulement toutes les vingt-quatre heures.

Le foyer, allumé à l’automne, ne s’éteint qu’au printemps ; avec 100 kilos de poussier, correspondant à une-dépense de 2 francs dans Paris, il chauffe 2 800 mètres cubes, c’est-à-dire une soixantaine de pièces ayant en moyenne 5 mètres de long et 4 mètres de large sur 3 de haut. Le charbon passe quatre jours entiers dans cette sorte de four, que lui-même chauffe, et par la chaleur duquel il est consumé. Ce lessivage progressif du combustible par l’air, admis à dose faible et renouvelée, système analogue à la diffusion des pulpes de betteraves par la vapeur d’eau, extrait lentement la totalité des principes brûlables jusqu’à complète incinération.

Le calorifère Michel Perret fournit une température régulière, mais qu’il n’est pas possible de dépasser. Il est aussi, comme tous les appareils à air, inapplicable aux très grands édifices ; le déplacement laborieux de l’air chaud ne lui permettant pas de desservir des locaux situés à plus de 30 mètres de distance horizontale. Si, comme il est probable, le chauffage collectif est destiné à se substituer un jour aux procédés actuels, c’est par le calorifère à vapeur que s’opérera cette transformation dans nos mœurs.

Déjà certains quartiers de New-York possèdent des stations centrales génératrices, d’où la vapeur sous pression est envoyée par un réseau de conduites à plusieurs centaines de maisons. Il n’est pas plus extraordinaire, si l’on y réfléchit, de distribuer ainsi la chaleur, qu’il ne l’est de recevoir à domicile sa lumière ou son eau d’une usine ou d’un réservoir de la banlieue. Le progrès, qui passe parfois pour engendrer l’individualisme, tend au contraire à associer les hommes pour la satisfaction d’un plus grand nombre de besoins et de désirs.


Vte G. D’AVENEL.