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Ce samedi soir, 4 heures trois quarts (16 juillet 1707).

« Mme de Vaudemont n’est qu’un prétexte, Madame, et c’est pour parler à Mme la duchesse de Bourgogne que je vous ai priée de remettre à demain votre voyage à Paris. Le Roi me dit hier au soir qu’il avait été surpris de voir les joueurs à La Bretesche[1]. Je vois par-là que Mme la duchesse de Bourgogne me trompe ; elle m’avait conté que Madame la Duchesse s’était priée elle-même à ce repas, et je vois que c’étoit une partie faite. Le Roi me dit qu’elle avoit prié Madame la Duchesse d’y venir, et ce fut M. de Lorges qui parut un des premiers. Je répondis qu’il étoit assez naturel que Madame la Duchesse fût chez son frère, mais que, pour le jeu, j’en étois plus fâchée que personne. « Le Roi me dit : « N’étoit-ce pas assez pour un jour qu’un dîner, une cavalcade, une chasse, une collation ? » Il ajouta, après avoir un peu rêvé : « Je ferai bien de dire à ces messieurs qu’ils ne me font pas bien leur cour de jouer avec la duchesse de Bourgogne. » Je dis que le lansquenet m’avoit toujours fait peine, par la crainte qu’elle ne fit quelque voyage qui lui fît tort et ne la mît sur un mauvais pied. On parla d’autres choses ; le Roi revint et me dit : « Ne ferai-je pas bien de faire parler à ces messieurs ? » Je répondis que je croyois que cette manière-là nuiroit à Mme la duchesse de Bourgogne, et qu’il vaudroit mieux lui parler à elle-même et que cela demeurât secret. Il me dit qu’il le feroit aujourd’hui. C’est pour l’avertir, Madame, que je vous ai suppliée de demeurer. Nous voilà arrivés plus tôt que je ne pensois à cet éloignement que j’ai toujours appréhendé. Le Roi croira l’avoir fâchée en rompant son lansquenet et sera plus froid pour elle ; il est vrai qu’elle sera fâchée et sera plus froide pour lui. Je penserai la même chose, et reprendrai le respect que je lui dois ; mais je ne suis pas encore assez détachée de l’estime du monde pour consentir qu’il croie que j’approuve une telle conduite… Si, après avoir parlé, Madame, vous pouviez venir à Saint-Cyr, j’en serais ravie ; mais je doute qu’après la triste conversation que vous devez avoir, vous soyez en état de paraître. S’il vous est possible d’aborder Mme la duchesse de Bourgogne, vous pourriez lui donner ma lettre, afin qu’elle se prépare à répondre au Roi, et vous lui parlerez ce soir plus au long. Vous jugez bien,

  1. La Bretesche était un petit village, entre Versailles et Marly, qui servait de rendez-vous de chasse,