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médiation à la France victorieuse ; elle tenait surtout à s’entendre avec l’Angleterre et à prendre la tête des forces militaires de toute la Confédération ; le cabinet prussien insinuait que, pour briser les résistances, il pourrait être amené à l’occupation des États récalcitrans.

Cette perspective ne pouvait nous agréer ; nous ne pouvions autoriser la Prusse à mettre la main sur la Saxe et le Hanovre, sous le prétexte de contenir leurs ardeurs belliqueuses ; aussi M. de Moustier ne cachait-il pas à M. de Schleinitz que, si l’occupation projetée à Berlin devait avoir le caractère d’une concentration de forces, centralisant les contingens fédéraux sur nos frontières, nous serions obligés de procéder à des mesures analogues.

Nos correspondances d’outre-Rhin devenaient de jour en jour plus alarmantes. Un de nos diplomates en disponibilité, M. Bourée, envoyé en mission secrète pour s’enquérir des tendances de l’opinion et des gouvernemens germaniques, adressait au ministère des Affaires étrangères les rapports les plus pessimistes. M. de Moustier, seul de nos agens en Allemagne, ne perdait pas le sang-froid. Ce n’est pas qu’il se fît illusion sur la sincérité des assurances tranquillisantes qu’on se plaisait à lui donner ; son esprit était trop pénétrant pour que des protestations aussi équivoques pussent endormir sa vigilance. Il lisait dans le jeu du cabinet de Berlin, mais, confiant dans le succès de nos armées, il comptait, pour arrêter la Prusse, sur nos premières victoires.

Le comte Walewski s’appliquait de son côté à rassurer les cours allemandes, sans leur cacher cependant que leur parti pris de faire cause commune avec l’Autriche nous autoriserait à envisager la convenance, au point de vue stratégique, d’une campagne sur le territoire germanique et même à choisir pour théâtre de la guerre l’Allemagne de préférence à l’Italie. Il croyait qu’une attitude énergique était le seul moyen d’agir sur elles et de calmer leur effervescence.


XVII. — LE CONGRÈS RÉCLAMÉ PAR LA RUSSIE

Le ministère Derby avait tout lieu de se féliciter de son « intervention amicale. » La mission de lord Cowley n’avait pas échoué. Le gouvernement autrichien reconnaissait maintenant la nécessité de faire la part du feu. Il se déclarait prêt à évacuer