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trente régimens d’infanterie, environ 20 000 hommes auxquels il faut ajouter 2 000 cavaliers, destinés à être remontés en Angleterre. Les vivres, les approvisionnemens de toutes sortes avaient été calculés d’après ces effectifs. La flotte fut concentrée à Lisbonne et à Cadix, sous les ordres du duc de Médina Sidonia, et mit à la voile le 29 mai 1588. Elle se porta à la Corogne où elle relâcha jusqu’au 29 juin. Au moment de prendre la mer, elle fut assaillie par une tempête qui fit périr trois galères de Portugal. Ce ne fut que le 21 juillet que l’expédition put lever l’ancre. Le 29, elle touchait au cap Lizard et, le lendemain, ses vigies signalaient les navires anglais de Charles Howard, près de Falmouth. Les Anglais laissèrent passer l’Armada, puis vers le soir, attaquant la queue du convoi, ils s’emparèrent d’un galion resté en arrière. C’était précisément celui qui portait la plus grosse partie des finances de l’expédition et tous les détails du plan de descente. A partir de ce moment, les Anglais talonnèrent l’arrière-garde, coulèrent un vaisseau et mirent le feu à un autre. L’Armada se rapprocha alors des côtes de France et se mit à l’ancre près de Calais, le 6 août. Dans ce mouvement, elle perdit encore deux grands galions de Lisbonne et cinq autres navires. Le vent soufflant du Sud, le désordre se mit dans la Hotte, si bien qu’entre les côtes de l’Angleterre et Flessingue, l’Armada perdit 55 de ses vaisseaux. Le reste de la flotte, refoulée vers le Nord, ne put supporter la rigueur des mers d’Ecosse. La plupart des vaisseaux furent jetés à la côte. Il ne revint en Espagne que 38 navires.

L’insuffisance notoire du commandement, l’indiscipline, le désordre rendaient cette fin inévitable. Cette expédition n’en est pas moins intéressante, en raison du grand parcours que put faire la flotte espagnole, de Lisbonne au cap Lizard, sans dommage sérieux, quoique les Anglais fussent maîtres de la mer.

Depuis la fin du XVIIe siècle jusqu’au commencement du XVIIIe, les essais ou projets de débarquement en Angleterre sont nombreux. Les uns échouent parce que nos flottes cherchent ou acceptent le combat, au lieu de se consacrer uniquement à l’opération principale : la descente. Les autres sont abandonnés au dernier moment. Mais il est intéressant de constater que presque toujours l’opération même du débarquement a réussi ou aurait pu certainement réussir, si la volonté de débarquer eût été fermement maintenue. Si les suites du débarquement n’ont pas été