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l’opothérapie leur doit, puisqu’elles en restent les colonnes et le véritable soutien.

Quant aux autres tentatives, on ne peut guère les considérer que comme des jalons d’attente. Une somme d’efforts énorme y a été dépensée vainement. Ils auraient été plus fructueux sans doute s’ils eussent été employés à creuser un sillon profond, au lieu de se disperser à tous les points de l’horizon. Les médecins ont essayé tous les extraits contre toutes les maladies ; ils ont procédé un peu à la façon des chercheurs d’or. Ils poursuivaient la grosse pépite. Ce n’est pas ainsi que dans le domaine scientifique se font les grandes fortunes ; c’est par un travail plus approfondi. Et, de fait, c’est sans grand succès que jusqu’à présent les opothérapistes ont exploré tous les organes. On a essayé les extraits de substance nerveuse contre la rage (Babes) et contre la neurasthénie (C. Paul) ; le liquide céphalo-rachidien contre l’ataxie locomotrice (Cros) ; le corps pituitaire contre l’acromégalie ; l’extrait du corps ciliaire contre certaines inflammations de l’iris (Dor) ; l’extrait du cœur contre la faiblesse du muscle cardiaque (Hammond) ; l’extrait de muscle contre certaines affections musculaires ; l’extrait de cartilages contre l’arthrite sèche (S. Hyde) ; la moelle des os contre l’anémie et la chlorose (Golscheider) ; la rate contre le paludisme ; le suc pulmonaire contre la phtisie (Grasset) ; l’extrait du rein contre l’urémie (Dieulafoy) ; l’extrait des capsules surrénales contre la maladie d’Addison ; le suc du pancréas contre le diabète ; le tissu du foie contre des affections diverses. Si le bénéfice de tant d’efforts est resté douteux, c’est que la méthode est réellement impuissante ou qu’elle a été appliquée à faux. Pour décider entre ces deux alternatives, il faut examiner les fondemens mêmes de la méthode, c’est-à-dire la doctrine des sécrétions internes.


IV

Les Sécrétions internes. — Le mot de sécrétion interne a été créé par Claude Bernard bien avant 1855. C’est ce physiologiste qui a fourni le premier exemple d’une production de ce genre, le plus clair et, peut-on dire, le seul qui, jusqu’à présent, soit connu exactement. Il a en effet distingué dans le foie la sécrétion externe, la bile, qui se déverse dans le tube digestif, de la sécrétion interne, le sucre, qui se déverse dans les vaisseaux sanguins. L’éminent