Page:Revue des Deux Mondes - 1899 - tome 152.djvu/203

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

créateur ; mais elle constitue réellement, dans un petit nombre de cas, une médication efficace, à côté de la sérothérapie et des grands progrès introduits par la révolution pastorienne dans l’hygiène, la médecine et la chirurgie de notre temps, il y a une place, modeste sans doute, mais encore honorable, pour la méthode de Brown-Séquard

C’est ce que nous voudrions montrer ici, en nous bornant, selon notre habitude, à l’examen des questions d’origine et de principe, impliquées dans toute découverte scientifique.


II

Le premier document relatif à la méthode opothérapique est une communication faite par Brown-Séquard, à la Société de Biologie dans la séance du 1er juin 1889.

C’était, en deux mots, l’histoire d’un vieillard qui venait, comme Faust, de retrouver la jeunesse. Agé de soixante-douze ans, ainsi que le narrateur lui-même, il avait commencé depuis quelques années d’éprouver plus lourdement le poids de la vieillesse. Il sentait décliner de jour en jour sa vigueur physique ; voué aux travaux de l’esprit, comme le narrateur encore, — dont le public comprit bien qu’il entendait l’autobiographie, — ce savant était devenu incapable d’en supporter longtemps la fatigue. Dans tous les rouages de l’économie se manifestaient les mêmes symptômes de décadence ; la machine montrait partout son usure. Les fonctions purement végétatives suivaient la décadence des fonctions plus nobles : les sécrétions étaient rares, les ingestions pénibles, les exonérations paresseuses.

En un mois, grâce à la médication orchitique, cet état de choses avait entièrement changé. Les tares de la sénilité avaient disparu. La force musculaire avait subi une notable augmentation. Le labeur mental plus actif était supporté plus longtemps ; les fonctions atténuées s’étaient restaurées ; les fonctions « abolies étaient restituées. C’était un véritable rajeunissement physiologique. Renan, que son collègue du Collège de France entretenait de ces effets merveilleux, avait prononcé le mot de « fontaine de Jouvence. »

Mais c’était une fontaine où il ne suffisait pas de boire une seule fois ; il fallait y revenir sans cesse, car l’amélioration était passagère et l’effet ne se soutenait pas au-delà d’un certain temps.