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par des ingénieurs anglais et américains le chemin de fer de Tientsin à Pékin, de prolonger un peu au-delà de la Grande Muraille celui qui, de Tientsin et de l’embouchure de Peï-ho, remonte vers le nord-est le long de la côte du Petchili, d’autoriser en même temps le rétablissement de la petite ligue de Shanghaï à Woo-soung, son port en eau profonde. Exécutés près des endroits les plus fréquentés par les Européens, du plus grand port ouvert, où habitent la moitié des étrangers établis en Chine, et de la capitale, où résident les diplomates, ces travaux étaient bien choisis pour jeter de la poudre aux yeux : peut-être aussi avait-on voulu relier Pékin à la mer, qui est anglaise, en Extrême-Orient comme partout, pour faire pièce à la Russie, installée en Mandchourie. En outre, un chemin de fer bien plus étendu, de Pékin à Han-kéou, traversant, sur 1 000 à 1 200 kilomètres, le cœur même de la Chine était en projet depuis 1889. Un directeur des chemins de fer, Cheng, avait été nommé pour s’en occuper et devait collaborer avec Li-Hung-Chang, et avec son rival, le célèbre vice-roi de Han-kéou, Chang-Chi-Toung. Plus sérieusement progressif peut-être que Li-Hung-Chang, celui-ci paraissait réellement désireux de construire cette ligne. Mais il prétendait que tout le matériel en fût fabriqué en Chine et, à cet effet, il avait installé à Hanyang, à côté d’Han-kéou et de sa capitale Wou-tchang — trois cités qui ne forment en réalité qu’une seule et immense ville — une grande usine métallurgique qui ne devait pas être avant bien des années en état de livrer les fournitures nécessaires. Après la guerre, les efforts réunis des ministres de France et de Belgique avaient obtenu qu’un syndicat financier franco-belge serait chargé de construire la ligne pour le gouvernement chinois et de l’exploiter ensuite ; mais des difficultés surgissaient sans cesse et, bien que l’administration chinoise eût commencé les travaux du côté de Pékin, tout se trouvait arrêté, à l’automne de 1897, par suite de difficultés dans l’interprétation de certaines clauses du contrat. C’était toujours, dans la question des chemins de fer, comme dans celle des douanes intérieures, comme partout, la même politique de moyens dilatoires et de faux-fuyans. Aucun pas n’avait été fait vers aucune réforme administrative, militaire ou autre.

Momentanément satisfaits des droits récemment obtenus, les étrangers n’élevaient cependant pas de nouvelles prétentions. Tout était au calme à Pékin, et l’on ne paraissait pas prévoir qu’il