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Kouang-si, que nous convoitions, allait donc être drainé par cette voie nouvelle.

Notre diplomatie chercha à réparer l’impression produite par ce traité anglo-chinois, qui annulait la plupart des avantages à nous concédés sur la frontière du Tonkin ; et l’on apprit à Paris, en juin 1897, que la Chine accordait à la France le droit de construire un chemin de fer, de Laokaï, où le Fleuve Rouge entre au Tonkin, à Ytinnan-Sen, capitale du Yunnan, et de prolonger, d’autre part, jusqu’à Nanning-fou et même au-delà, vers le nord, la ligne en projet de Langson à Long-tchéou. Cette dernière concession pourrait nous servir à conserver en tout état de cause le trafic du Kouang-si occidental, si tant est qu’il vaille la peine de construire une voie ferrée pour le capter. Toutefois, les rivières navigables ont sur ces chemins de fer, en pays montagneux et pauvre, un avantage bien évident. Dès que les premières sont ouvertes, on peut s’en servir ; quand les seconds sont concédés, il reste, au contraire, à les construire, ce qui est coûteux d’abord, et fort long ensuite, surtout quand on a affaire à des administrations françaises et chinoises. En février 1898, j’ai pu m’assurer par moi-même que le Si-kiang était déjà sillonné de bateaux à vapeur, alors que la partie située en Chine du chemin de fer de Langson à Long-tchéou, concédé pourtant depuis 1896, n’était pas encore commencée, à cause de difficultés diverses avec les autorités chinoises locales.


III

Après les luttes diplomatiques qui avaient suivi les rudes secousses de la guerre, la question d’Extrême-Orient paraissait entrer, vers l’été de 1897, dans une phase d’accalmie. Toutes les puissances européennes intéressées en Chine, la Russie, la France, l’Angleterre, avaient eu leur lot ; on jugeait celui de l’Allemagne modique, mais l’on commençait à croire qu’elle n’aurait pas de visées politiques dans le Céleste-Empire et qu’elle voulait se contenter d’y développer ses intérêts économiques. D’autre part, la Russie et le Japon s’étaient tant bien que mal entendus en Corée. Sans doute, ces arrangerions n’étaient, pas définitifs et les ambitions de chacun semblaient plutôt assoupies qu’entièrement satisfaites ; mais la mise à profit des avantages obtenus, et les préparatifs mêmes que chaque nation devait faire pour se trouver en