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pendant les années sèches, au contraire, les différences deviennent considérables ; dans les parcelles, l’eau du sous-sol remonte par capillarité jusqu’aux couches moyennes et y tempère l’influence désastreuse de la sécheresse, qui sévit dans les cases, où ces réserves font défaut. Pendant l’automne très sec de 1895, les betteraves à sucre des parcelles ont présenté une grande richesse, leur composition cependant n’avait rien d’anormal ; dans les cases, au contraire, où l’approvisionnement du sous-sol n’existe pas, on a recueilli de petites racines, racornies, desséchées à un point tel qu’elles renfermaient 64 centièmes d’humidité au lieu de 78 à 80, qu’on y dose d’ordinaire.

Approvisionner d’eau la couche ameublie, assurer de puissantes réserves dans le sous-sol, telle nous paraît être la principale utilité du travail obstiné du cultivateur ; mieux la terre est émiettée, plus elle est perméable et plus aussi l’infiltration est facile. Or, si cette pénétration est utile quand la plante a formé ses racines et qu’elles arrivent dans les profondeurs, il est un moment, au contraire, où l’infiltration devient nuisible, où il faut retenir l’eau dans la couche superficielle, c’est l’époque des semis. La graine ne germe qu’autant qu’elle est imprégnée d’humidité ; pour que la levée soit régulière, c’est-à-dire pour que l’embryon contenu dans la graine utilise à la formation de ses organes rudimentaires, radicelle et tigelle, les alimens qui l’enveloppent, pour que ces réserves soient dissoutes et assimilées, il faut que la graine ait absorbé de l’eau.

La réussite du semis n’est certaine que si la terre est humide ; et, si les divers travaux auxquels se livre le cultivateur ont essentiellement pour but d’assurer la descente de l’eau dans le sol, comment va-t-il opérer pour qu’au contraire la couche superficielle soit mouillée ? Il va exécuter une opération non seulement différente, mais inverse, des précédentes. Pendant l’automne, l’hiver, le printemps, il a ameubli sa terre, il l’a émiettée, rendue poreuse, de façon que toute l’eau tombée fût recueillie, emmagasinée, mise à l’abri de l’évaporation ; après les semailles, il faut opérer autrement et retenir l’eau de la pluie dans les couches superficielles et même favoriser son ascension, par capillarité, des couches profondes jusqu’à la surface. L’expérience a enseigné depuis longtemps ce qu’il convient de faire pour y réussir ; aussitôt qu’un jardinier a semé des graines, il piétine la plate-bande où il vient de les enfouir… les cultivateurs agissent d’une façon analogue,