Voici ce qui s’était passé.
L’évêque de Luçon, ayant quitté Blois, en juin 1617, avait conservé des relations assez suivies avec l’entourage de la Reine, et, par conséquent, une certaine influence sur elle, jusqu’au moment où il avait dû se rendre à Avignon, en avril 1618. À partir de ce moment, Marie de Médicis s’était trouvée livrée à elle-même. Comme la plupart des femmes, elle était incapable de rester seule, sans confident et sans guide. Ayant cherché à renouer une correspondance avec Barbin, elle avait éprouvé une cruelle déception. Elle ne savait plus où se prendre.
Depuis longtemps déjà, Ruccellaï guettait ce moment. En juillet 1617, il avait écrit à la Reine une lettre adroite pour l’assurer de son dévouement toujours fidèle, et préparer sa rentrée en grâce. Bientôt, il était venu en personne. Il avait trouvé le terrain tout préparé par ceux qui, comme lui, étaient, avant tout, les adversaires de l’évêque de Luçon, Chanteloube, Bonzy, évêque de Béziers, Villesavin, secrétaire des commandemens, et autres.
Il ne s’en tenait pas aux protestations et aux complimens. C’était un homme d’entreprise, une imagination sans cesse en mouvement. Il avait conçu un plan d’action extrêmement hardi et qu’il opposait d’emblée aux procédés dilatoires, au système de temporisation et de réserve, préconisés par Richelieu. Il prétendait faire de la Reine-Mère le chef d’un grand parti d’opposition, prêt, s’il était nécessaire, à recourir aux armes pour amener Luynes à composition. De telles pensées devaient trouver un facile accès près du cœur ulcéré de Marie de Médicis. Celle-ci, en effet, dans les derniers temps, n’avait pas été ménagée. Outre l’affaire si pénible de Barbin, elle avait vu l’envoyé du duc de Toscane à Paris, un certain Bartolini, expulsé contrairement à toutes les règles de la courtoisie internationale, principalement parce qu’il était accusé d’entretenir avec elle des relations suspectes ; et elle avait suivi, de loin, dans des sentimens qu’il est facile de deviner, les différentes phases des fiançailles et du mariage de sa fille, Madame Christine, avec le prince de Piémont, décidées et accomplies en dehors d’elle, sans qu’elle eût été avertie ou consultée autrement que pour la forme.
Ainsi, au moment où elle souffrait le plus de son éloignement