aux limites fixées par les traitas. » Cependant, dans les derniers mois de 1886, de nombreuses usines à homards étaient construites sur le French Shore, entre le cap Saint-Jean et le cap Haye, par des sujets britanniques : les Anglais se rendaient ainsi coupables des actes mêmes qu’ils entendaient défendre aux Français. Et ces usines, en dépit des réclamations du gouvernement de la République, ne furent jamais fermées. Lord Salisbury, dans une note du 28 mars 1889 à notre ambassadeur, déclara ne voir dans l’existence et le fonctionnement de pareils établissemens aucune violation des privilèges garantis aux Français par les traités ; en revanche, il prétendit que non seulement les Français ne pouvaient construire des établissemens à poste fixe, mais encore qu’ils n’étaient point autorisés à pêcher le homard<ref> Livre jaune. Affaires de Terre-Neuve, 1891, p. 213. Voir aussi la dépêche de M. Waddington, ambassadeur de la République française à Londres, à M. Spuller, ministre des Affaires étrangères du Ier avril 1889, et celle de l’amiral Krantz, ministre de la Marine et des Colonies, à M. Spuller, du 11 mai 1889, dans le Livre jaune, Affaires de Terre-Neuve. 1891, p. 211 et 214.</ef>. La question des homards et des homarderies se trouvait ainsi nettement posée. Les allégations du premier ministre britannique étaient-elles juridiquement fondées ?
C’est en tirant argument du texte même du traité d’Utrecht que lord Salisbury a contesté aux sujets français le droit de pêcher le homard. L’article 13 de ce traité, a-t-il remarqué, n’a donné aux Français que le droit de pêcher les poissons « qui peuvent être sèches sur des tréteaux et des chauffauds ; » or, tel n’est pas le cas pour le homard. Nous ne faisons nulle difficulté de reconnaître que les homards ne se traitent point dans des sécheries ; mais est-il bien vrai que le traité de 1713 ait restreint aux poissons pouvant être séchés sur des tréteaux et des chauffauds la faculté de pêcher de nos compatriotes ? Le traité, par ses termes mêmes, leur a en réalité conféré deux droits distincts : le droit de pêcher, puis le droit de sécher le poisson sur la côte. C’est la conclusion qui ressort vraiment du texte latin du traité, qui en est le texte original ; on y lit, en effet, ce qui suit : « Subditis Gallicis piscaturam exercere et pisces in terrà exsiccare permissum exit. » Ainsi le droit de pêche est reconnu aux Français de la manière la plus générale, sans aucune restriction ; ils peuvent s’emparer de tous les poissons quelle que soit leur espèce, qu’ils soient susceptibles ou non d’un séchage sur la terre. Le traité de 1763, qui se réfère au traité