un Augustin, Mariano Gil, qui découvre les papiers de la conspiration du Katipunan. Aussitôt le gouverneur est sommé de sévir.
Je ne sais rien de plus curieux à lire que le mémoire présenté au Sénat espagnol par le maréchal Blanco. Blanco avait pris le pouvoir le 8 mars 1893, au moment où les loges maçonniques commençaient à bruire, presque à la veille du grand éclat. Intelligent, légèrement sceptique, plus soucieux de tranquillité que de gloire militante, et moins désireux de s’illustrer dans une sanglante répression que de léguer à son successeur une situation dont la diplomatie seule pouvait retarder le cataclysme, assez bon homme au fond, peut-être aurait-il pu, de l’avis même des insurgés, détourner de l’Espagne le fléau de la guerre, si les intéressés, le sentant se dérober à l’éperon, n’avaient soudoyé contre lui l’animosité des folliculaires, l’insulte de la foule, les clameurs des étudians, et jusqu’aux défiances de ses généraux. Quand, en 1897, il revint à Madrid, devancé et poursuivi par des accusations d’apathie, de mollesse et d’imprévision, il composa ou fît rédiger ce mémoire justificatif. C’est sa cause qu’il plaide, et un peu celle de la justice et de l’humanité. À côté d’enflures et de phrases déployées en fraises espagnoles, on ne saurait rester insensible aux accens presque douloureux de cet homme empêché de tout dire et contraint, pour se faire pardonner son aversion des tyrannies impitoyables, d’étaler et même de grossir le nombre de ses morts. Le plaidoyer est véhément, tenace, étincelant de colère, traversé d’une éloquente indignation dont parfois l’écho sonore réveille, à l’horizon des souvenirs, les fanfares du Romancero. « Quoi, nobles sénateurs, on accuse de mollesse un général qui a commandé quatre armées, soutenu des campagnes difficiles sans qu’un homme ait bronché, gouverné la Navarre, l’Aragon, l’Estramadure, la Catalogne et Cuba !… » Du reste, avant l’insurrection n’a-t-il pas déporté mille quarante-deux personnes ? N’en a-t-on pas fusillé trente-sept durant le mois de septembre ? Que veut-on de plus ? La force et l’énergie se prouvent-elles par des fusillades ? La politique d’attraction qualifiée aux colonies d’arlequinade ridicule le cédera-t-elle toujours à la politique de répulsion et de terreur ?… C’est un moine, le R. P. Augustin Fray Eduardo Navarro, qui, dans son livre intitulé Filipinas, avait dressé le réquisitoire contre Blanco. C’est à l’instigation des moines que, le 31 octobre, on télégraphia de Hong-Kong à Madrid : « Situation s’aggrave, rébellion s’étend ; apathie de Blanco inexplicable ;