extraordinaires, et à plus forte raison à des missions secrètes, il affaiblissait le crédit de ses ambassadeurs en mission régulière. L’amiral La Roncière Le Noury, assurément, était un homme distingué, séduisant, mais le duc de Montebello n’était pas moins aimable et intelligent ; et il avait en plus l’avantage de connaître son terrain.
Plus nous manifesterions le désir de traiter, plus on nous demanderait de concessions sans rien nous donner en échange ; la chose était claire. D’ailleurs la Russie ne pouvait pas, avec la meilleure volonté, se soustraire à ses exigences intérieures, ni mettre à notre service des armées dont elle ne disposait pas. Alexandre II avait confessé loyalement, à Stuttgart, les difficultés qui le paralysaient. Le marquis de Châteaurenard, étant chargé d’affaires en l’absence de son chef, avait fait ressortir, dans des rapports substantiels, les embarras de tous genres, — l’émancipation des serfs, la pénurie du Trésor, la réorganisation de l’armée, — qui pesaient sur la Russie et l’empêcheraient de jouer un rôle militant dans les événemens, s’il devait en surgir. Une convention ne pouvait donc rien ajouter à ce qu’on nous avait spontanément promis à Stuttgart. Edifié sur ses moyens d’action par nos correspondances de Saint-Pétersbourg, il eût été plus délicat et plus habile de s’en tenir à la parole du tsar. Lui demander de libeller ses promesses dans un traité, c’était mettre sa loyauté en doute.
Le comte Walewski, avec son énergique bon sens, réussit à le faire comprendre à l’Empereur, lorsque enfin, dans les derniers jours de novembre, Napoléon III se fut décidé à l’initier à ses arrangemens avec M. de Cavour et aux missions du prince Napoléon à Turin et à Varsovie. Il était temps, car déjà l’amiral La Roncière était en route. À son arrivée à Pétersbourg, il trouva une dépêche télégraphique qui l’invitait à n’entrer dans aucun pourparler avec le prince Gortchakof et à revenir à Paris sans débrider. Les missions extraordinaires sont parfois mortifiantes. Le prince Gortchakof fit la grimace ; il croyait déjà tenir en main la clef des dissensions entre la France et l’Angleterre, et elle lui échappait !
Le comte Walewski avait bien jugé ; la Russie, en nous voyant résolus à ne pas lui fournir les moyens de nous brouiller avec les Anglais, vint spontanément, au mois de mars, nous offrir de reprendre les pourparlers de Varsovie. M. de Kisselef était