sont connus de tout le monde. Assurément ils ont été graves, et peut-être le sont-ils encore. Cependant le ciel, qui était encore très obscur il y a quelques jours, a une tendance à s’éclaircir, et la circulaire russe vient à propos pour profiter de cette éclaircie.
Au reste, si les circonstances peuvent ajourner la réalisation du programme de l’empereur Nicolas, ce programme ne tient pas à ces circonstances et doit naturellement leur survivre. Il importe donc de le mettre dès maintenant à l’étude : c’est tout ce que propose aujourd’hui, et pour aujourd’hui, le comte Mouravief. Avant de se rendre à la conférence prochaine, les divers cabinets doivent s’entendre sur les principales questions à y débattre. Le comte Mouravief a donc bien fait d’indiquer tout de suite ce qu’il appelle « les thèmes à soumettre à la conférence » et « d’en résumer les traits généraux. » Sa circulaire énumère huit articles, qui se divisent naturellement en deux groupes. Les quatre premiers se rapportent à l’idée principale qui a déterminé l’initiative de l’empereur Nicolas, c’est-à-dire à l’arrêt qu’il y aurait lieu de mettre au développement des arméniens militaires, soit sur terre, soit sur mer, et aussi à la condamnation de certains instrumens de combat. Les trois articles suivans ont pour objet de rendre la guerre maritime plus humaine, en lui appliquant les règles de la convention de Genève, et tendent à la révision de la déclaration de Bruxelles de 1874. Enfin le huitième et dernier article cherche à prévenir la guerre par l’acceptation, en principe, de l’usage des bons offices, de la médiation et de L’arbitrage facultatif, pour les cas qui s’y prêtent. Les quatre derniers articles ne nous paraissent soulever aucune objection : il n’en est pas tout à fait de même des quatre premiers.
Si rien n’est à quelques égards plus souhaitable, rien d’autre part n’est plus difficile que d’imposer un point d’arrêt pur et simple « à l’accroissement des forces militaires. C’est pourtant ce que propose le comte Mouravief, et il annonce que, le premier pas une fois fait, il en restera un second à faire pour rechercher « les voies dans lesquelles pourrait même se réaliser, dans l’avenir, une réduction des effectifs et des budgets militaires. » Cette réduction, évidemment, devrait être proportionnelle : dès lors, le second pas serait plus facile que le premier, si le premier était une fois fait. Tous les pays resteraient de la sorte, les uns à l’égard des autres, dans la situation où ils sont aujourd’hui. Mais c’est précisément là ce qu’on aura de la peine à faire accepter par quelques-uns d’entre eux. Comment obtenir d’un pays, s’il a des ressources disponibles, ou si, d’une manière ou d’une autre, il est à même de se les procurer, qu’il ne les affecte pas à sa défense