en ce moment même, elle tente de mettre sa gigantesque main sur l’Égypte et le Soudan. Naturellement, elle veut aussi sa part dans le partage actuel de l’Afrique.
Comme toujours, aussitôt en possession d’une terre nouvelle, les Anglais se hâtent de la mettre en production et en tirent tout le parti possible. Leur intelligence pratique, leur instinct de race particulier, instinct développé encore par une éducation bien spéciale, les disposent merveilleusement pour l’exploitation de ces conquêtes lointaines. Hardis, toujours prêts à quitter famille et patrie, doués d’un grand esprit de suite, âpres au gain, poussés plutôt par l’impérieuse obligation d’acquérir des ressources en rapport avec leurs dispendieux besoins, ils partent vers le pays nouveau, à la conquête de leur propre fortune ; et ils ont bientôt fait ainsi collectivement la conquête économique du pays lui-même.
Anglais pauvres, soucieux de gagner plus largement leur vie, fils de négocians riches, décidés à se créer une situation personnelle, cadets de famille, résolus à faire leur chemin en ce monde, tous vont sans hésiter vers le coin de terre où la lutte pour le succès promet d’être plus profitable, sinon moins difficile. Ils ont d’ailleurs deux élémens de réussite : l’un, c’est l’intensité industrielle et le développement commercial de la mère patrie ; l’autre, plus particulier, consiste dans les attaches et les relations familiales étroitement gardées par eux. Ainsi poussés et secondés, admirablement soutenus par une administration réduite à son minimum de réglementation, rien ne fait obstacle à leur carrière coloniale.
Il serait inutile de citer tel ou tel exemple de cette remarquable aptitude des Anglais à faire prospérer leurs colonies. Il suffit de les observer sur tous les points du globe où flotte leur drapeau et même, pouvons-nous ajouter, sur ceux où ils espèrent le planter. On retrouve partout le même principe dominant : tirer tout le profit possible de la terre conquise ; et l’emploi du même moyen : la mise en valeur, par une activité commerciale qui croît avec les besoins nouveaux introduits en même temps que la civilisation anglaise. On comprend, dès lors, comment l’Angleterre, avec ses propres colons, bénéficie du plus productif empire colonial qui fut jamais.
La France a, en ces dernières années, annexé la Tunisie ; elle a, en Extrême-Orient, étendu sa domination sur l’Indo-Chine, le Tonkin et L’Annam ; nous venons enfin de prendre Madagascar. Nous aussi sommes donc à la tête d’un domaine colonial, assez vaste pour satisfaire notre amour-propre national ; domaine véritablement conquis