Nous bataillons pour conquérir de nouvelles colonies et pour agrandir nos possessions actuelles. Ces extensions de territoires, habilement présentées au pays, lui donnent l’illusion d’une puissance acquise considérable et toujours croissante. Il semble, à la première pensée, que la patrie grandisse avec ces conquêtes lointaines et que l’annexion d’une région, une ou plusieurs fois grande comme la France, double la puissance de la patrie elle-même. Puis, cette idée que nous sommes à la tête d’un vaste empire colonial, flatte notre amour-propre, toujours facile à la flatterie. Pour beaucoup, ces apparences de grandeur coloniale suffisent. Ils prennent pour vrai ce qui est seulement nominal et croient à l’importance réelle de conquêtes, lesquelles, inexploitées, n’ont pourtant d’autre valeur que l’étendue.
Un examen réfléchi dissiperait vite toute vaine croyance ; mais combien peu, chez nous, s’occupent du fond des choses et de la vérité des faits, quand choses et faits se passent au loin. Sans doute, la possession de nombreuses colonies a, en soi, de quoi caresser notre vanité ; pourtant cette simple satisfaction est-elle suffisante pour justifier Les efforts que nous a coûté leur conquête et les dépenses que nécessite leur administration ?
Nos dépenses coloniales sont montées, pour la Métropole, de 41 millions en 1887, à 100 millions en 1898, sans que, d’autre part, il soit démontré que nous ayons fait quelque réelle colonisation. Nous paraissons avoir fait seulement de l’administration coloniale. Nous nous obstinons à rester, quand même, dans le domaine purement sentimental de la satisfaction qui résulte de nos conquêtes et des espérances