grossiers, les Chinois sont très « noceurs, » dès qu’ils ont quelque argent. Les lieux de plaisir ne forment sans doute pas chez eux, comme au Japon, le plus beau et le plus brillamment éclairé des quartiers de la ville ; pourtant, ce qui attire d’abord les regards dès qu’on arrive à Canton, ce sont les bateaux de fleurs, constructions flottantes à deux étages superbement décorées à l’intérieur.
Mais le vice national des Célestes est l’amour du jeu, et bien peu d’entre eux paraissent y échapper. « Des pauvres en haillons, dit, dans son intéressante monographie de Pékin, Mgr Favier, jouent jusqu’à leur dernier vêtement ; des fanatiques jouent leurs femmes et leurs enfans ; enfin on joue, paraît-il, jusqu’aux phalanges de ses doigts ! Un jeune homme, joueur effréné quoique chrétien, avait joué et perdu sa femme qui n’avait pas vingt ans ! Et pour combien ? pour dix-huit francs ! Le missionnaire paya la dette et rendit la jeune femme à sa mère. Quelques mois après, elle avait rejoint son mari et, ajoute tristement l’auteur, avec l’autorité que lui donne l’expérience de ses trente-huit ans de séjour en Chine, on ne pourrait affirmer qu’il ne l’ait pas jouée et perdue de nouveau. »
L’intempérance au contraire est rare, et l’on fait un usage restreint des boissons alcooliques. Ceux qui seraient des ivrognes en Europe, me disait à Pékin Mgr Favier, sont, ici, des fumeurs d’opium, et il évaluait à un cinquième de la population des villes le nombre de ceux qui se livrent à cette abrutissante passion ; dans les campagnes, la proportion serait beaucoup plus faible, peut-être dix fois moindre ; un autre missionnaire, qui résidait au Fokien, en Chine méridionale, l’estimait, dans sa province, à 5 pour 100. L’habitude de l’opium est très répandue dans les classes élevées, et chez les lettrés. Mais, si elle a son action stupéfiante habituelle, elle y fait moins de ravages physiologiques que chez les gens du peuple, dont la force de résistance est déjà diminuée par le surmenage et les privations, et qui passent leurs nuits et leurs courts instans de repos à fumer, dans d’horribles taudis, des produits de qualité inférieure : un jeune homme commence-t-il à vingt ans à s’abandonner à cette passion, il est souvent mort à vingt-deux.
De ces vices des Chinois les étrangers qui vivent dans leur pays ne sont guère choqués, puisqu’il ne tient qu’à eux de ne pas s’en apercevoir ; ils sont plus incommodés de la répugnante et universelle malpropreté et des défauts secondaires tels que