appétits dévorans d’un Saïd, ni surtout d’un Ismaïl. Les impôts versés par les fellahs, à grand renfort de corvée et de courbache, produisent des sommes énormes, mais inférieures encore à celles qu’exigent les prodigalités du maître, qui couvre le Caire et Alexandrie de palais et s’attribue en même temps, à lui et aux siens, une partie des terres les plus riches de la nourricière vallée du Nil. Il faut emprunter. On s’adresse à l’Europe : à partir de 1862, une série d’opérations conclues avec les financiers de Paris et de Londres ont toutes pour but d’amener des millions dans les caisses khédiviales ; aucune forme d’emprunt n’est négligée : dette consolidée, amortissable, obligations gagées sur des terres, assignations de revenus spéciaux, bons du Trésor, dette flottante d’administrations particulières. Les taux auxquels sont obtenues les avances deviennent monstrueux, ils s’élèvent à 30 pour 100 l’an ; et, en dépit, ou plutôt à cause même de cette exagération, le crédit se resserre de plus en plus. Tous les symptômes avant-coureurs de la catastrophe s’accumulent ; après avoir eu recours aux multiples expédiens que l’ingéniosité de son esprit a pu lui suggérer, le Khédive est acculé à la faillite inévitable et se voit contraint de suspendre ses paiemens.
L’Europe s’émeut alors : la France et l’Angleterre, dont les nationaux forment le gros des créanciers lésés, font entendre leur voix. Ismaïl paraît réorganiser à la fois la dette et l’administration, les soumet au contrôle de deux hauts fonctionnaires, désignés par les cabinets de Paris et de Londres, et institue une commission de la Dette publique, où sont appelés à siéger des représentans de la France, de l’Angleterre, de l’Italie, de l’Autriche. Cette seconde période, celle du condominium anglo-français, ne dure pas longtemps. Le Khédive supporte impatiemment l’intervention quotidienne des contrôleurs généraux ; il ne tient pas les engagemens souscrits par lui ; il est déposé et remplacé par son fils Tewfik. Celui-ci, plus docile, cède aux conseils de l’Europe, et, par la loi de liquidation, règle en 1880 le sort des porteurs des diverses catégories de dette. La commission internationale de la Dette est organisée fortement et mise en possession, d’une façon effective, dis revenus qu’elle doit employer au paiement des créanciers. Les commissaires sont reconnus comme représentais légaux de ces derniers, et, à ce titre, autorisés à poursuivre, devant les tribunaux mixtes institués en 1875, l’administration des finances égyptiennes. Durant cette troisième