C’était par un acte émanant de sa souveraineté qu’Ismaïl avait prétendu régler en 1876 le sort des finances égyptiennes. Le régime, institué par les décrets que nous venons de rappeler, ne devait pas vivre longtemps dans la forme imaginée par le Khédive ; mais il n’en prépara pas moins la réorganisation, en ouvrant la porte à l’intervention de l’Europe ; et si, depuis lors, de nombreuses modifications ont été introduites, la base de la réforme, c’est-à-dire l’institution d’une caisse de la dette chargée de gérer les revenus affectés aux créanciers, n’a pas été altérée. La seconde période a été marquée au début par le règlement des dettes des Daïra, c’est-à-dire des trésors particuliers du Khédive et de sa famille, opéré par des contrats intervenus à la suite de longues négociations menées par MM. Joubert et Goschen. Aux termes de la convention du 12 juillet 1877, deux contrôleurs de la Daïra devaient être nommés par les créanciers étrangers, et, pour la première fois, par leurs représentans, MM. Goschen et Joubert. Ils avaient pour mission d’inspecter et de contrôler le service de la dette, ainsi que l’administration des revenus de la Daïra, dont, avec le directeur général, ils formaient le conseil supérieur.
Les événemens ne tardèrent pas à prouver que l’exécution des mesures prescrites par les décrets de 1876 se heurtait aux plus grandes difficultés : les recettes de l’État étaient loin d’atteindre les sommes prévues. Le Khédive institua, par décret du 27 janvier 1878, une commission supérieure d’enquête qui, sous la présidence de M. Ferdinand de Lesseps et la vice-présidence de sir Rivers Wilson, reçut pour mission de rechercher l’étendue du déficit dans les diverses branches des recettes ; de vérifier les abus et irrégularités dans l’application des lois et règlemens relatifs à l’assiette et à la perception des impôts de toute nature ; d’étudier les moyens d’y porter remède, et de constater le montant des revenus sur lesquels le gouvernement pourrait compter. Dans un rapport préliminaire, daté d’août 1878, la commission insistait sur ce que la cause principale des désordres financiers avait été le pouvoir absolu exercé pendant si longtemps en cette matière par le Khédive, pouvoir dont il avait profité pour s’attribuer un grand nombre de propriétés : elle réclamait en conséquence le retour à l’État de la portion de la Daïra qui n’était pas